04 mai 2014

Ukraine : stop aux velléités de guerre civile du gouvernement illégitime !

Dmytro Yaroch, leader du mouvement néo-nazi ukrainien Pravyi Sektor (Secteur droit) a récemment déclaré lors d’une conférence de presse que le rêve des ukrainiens était réalisé, car « l’armée de Bandera a franchi le Dniepr » ; Stepan Bandera étant le fondateur de l’Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN), organisation ultranationaliste qui prit fait et cause pour l’occupant nazi durant la Deuxième Guerre mondiale, et se rendit coupable d’innombrables massacres de communistes, de Juifs et de Russes. Cette déclaration jette un éclairage sinistre sur la situation que vit aujourd’hui l’Ukraine, dirigée par un gouvernement illégitime issu d’un coup d’Etat comptant en son sein des ministres issus du parti néo-nazi Svoboda (Liberté), un Etat à la dérive, au bord de la faillite et où les bandes fascistes font la loi, un pays écartelé entre l’Est et l’Ouest et qui s’achemine dangereusement vers une guerre civile.

L’espoir qu’ont pu caresser certains manifestants de la place Maïdan de mettre fin au règne des oligarques et de la corruption est bien vite retombé. Le gouvernement est tenu par le parti Batkivtchina (Patrie), le parti, de droite, de Ioulia Timochenko, une ancienne oligarque qui a fait fortune dans le commerce du gaz et qui a allégrement trempé dans des affaires de corruption. Le candidat qui semble bien parti pour remporter l’élection présidentielle est l’oligarque Petro Porochenko. Et des oligarques ont été désignés comme gouverneurs dans les régions de l’Est du pays (en effet, en Ukraine les gouverneurs régionaux sont directement nommés depuis Kiev). Le nouveau gouvernement a ainsi clairement montré qu’il est quand au fond, exactement comme le précédent, à la solde des oligarques et des possédants. Non seulement aucune mesure n’a évidemment été prise pour mettre fin à l’accaparement des richesses nationales par quelques uns, mais le nouveau pouvoir n’a d’autre politique économique que de quémander des prêts de l’UE et du FMI avec pour contrepartie une politique d’austérité brutale dont souffrira avant tout le peuple ukrainien : baisse de retraites et hausse des tarifs du gaz pour les ménages de 50%.

Le régime actuel est parvenu au pouvoir en s’alliant avec une extrême-droite ouvertement néo-nazie et en jouant la carte d’un nationalisme forcené. La traditionnelle fête de la Victoire sur le nazisme du 9 mai est menacée d’interdiction pendant que Bandera est publiquement célébré comme héros national et que la division de la SS de Galicie est réhabilitée à Lviv, dans l’Ouest du pays…Pravyi Sektor et d’autres groupuscules d’extrême-droite font la loi dans le pays, agressent des responsables communistes et des opposants au régime putschiste en place et même des vétérans de le Deuxième Guerre mondiale. Des locaux du Parti communiste d’Ukraine (KPU), dont le siège central à Kiev, ont été saccagés et incendiés en toute impunité par les néo-nazis. Des responsables communistes ont été sauvagement battus et torturés. Certains candidats à l’élection présidentielle ne peuvent se déplacer dans certaines parties du pays sans être agressés par les fascistes. Le gouvernement a refusé de désarmer les milices néo-nazies, en violation flagrante des accords de Genève, et la police n’intervient pas, ce qui équivaut à un soutient ouvert à l’extrême-droite et à ses violences. Et le gouvernement envisage sérieusement d’interdire le KPU. Des opposants au nouveau régime, des partisans de la fédéralisation du pays sont arrêtés sous divers prétextes et poursuivis en justice pour atteinte à l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Dirigée par un gouvernement illégitime à la botte des oligarques et qui poursuit ses opposants en justice, livrée au violences d’extrême-droite sous le regard indifférent de la police, l’Ukraine n’est sans doute pas, encore, une dictature, mais ne peut guère plus prétendre au titre de démocratie…

Face à cette dérive antisociale et antidémocratique du gouvernement illégitime, face à un nationalisme antirusse exacerbé, face à la terreur exercée par les milices d’extrême-droite, les populations russophones de l’Est et du Sud de l’Ukraine se sont soulevées, avec le soutien moral, médiatique, et peut-être logistique de la Russie. Ils réclament un référendum sur l’autonomie de leurs régions, le droit d’élire eux-mêmes leurs gouverneurs, la libération de tous les prisonnier politiques et une fédéralisation de l’Ukraine. Pour se faire entendre, ils ont utilisé les mêmes méthodes quant au fond que les manifestants de Maïdan, les rassemblements et l’occupation des bâtiments administratifs. Mais le gouvernement illégitime n’a pas voulu entendre leur demandes, pourtant parfaitement raisonnables et justifiées, et pour seule réponse les a qualifié de séparatistes, ce qu’ils ne sont pas, et de terroristes. Visiblement, ce qui était parfaitement normal de la part des manifestants de Maïdan devient tout à coup inadmissible de la part des habitants de l’Est de l’Ukraine, exemple typique de la politique de deux poids deux mesures.

Les partisans de la fédéralisation du pays dans l’Est et le Sud de l’Ukraine ont alors décidé de ne plus obéir au gouvernement illégitime de Kiev et de prendre leur destin en main. Une République populaire du Donbass a été proclamée à Donetsk. Des bâtiments administratifs sont occupés. Des villes entières échappent au contrôle de Kiev. Des milices d’auto-défense populaires armées se sont organisées. Les activistes pro-fédéralisation tiennent à organiser un référendum le 25 mai, avec ou sans l’accord du gouvernement et de ses oligarques gouverneurs. Le gouvernement illégitime, au lieu de négocier, n’a d’autre réponse que la force et a commencé une opération « anti-terroriste », lançant contre les insurgés l’armée, les bandes néo-nazies, la garde nationale nouvellement formée et comprenant en son sein nombre de fascistes issus des milices d’autodéfense de Maïdan, ainsi que, d’après des rumeurs non dénues de crédibilité, des mercenaires de Blackwater. Les forces gouvernementales et des milices d’extrême-droite ont attaqué des check-points des militants pro-fédéralisation, faisant plusieurs morts, dont des citoyens désarmés. Cette politique criminelle du gouvernement putschiste menace de faire plonger le pays dans la guerre civile.

Les médias occidentaux présentent généralement les militants pro-fédéralisation comme des « pro-russes », voire comme des marionnettes de Moscou. C’est inexact. Il est vrai que l’on voit des drapeaux russes dans les manifestations des partisans de la fédéralisation de l’Ukraine. Mais les manifestants ont de très bonnes raisons de vouloir rechercher un rapprochement avec la Russie de leurs régions. En effet, l’économie de l’Est de l’Ukraine, fondée sur les mines de charbon et l’industrie lourde, dépend très fortement des exportations vers la Russie. Si le gouvernement illégitime, lui à la solde des USA et de l’UE et de leurs visées impérialistes, parvient à ses fins et coupe les ponts avec la Russie, des dizaines de milliers de personnes perdraient leurs emplois. Il est vrai aussi que la Russie soutient les mouvements populaires à l’Est et au Sud de l’Ukraine. Bien entendu, nous ne nous faisons pas d’illusion sur les motivations du Kremlin, qui défend avant tout ses intérêts stratégiques et veut éviter l’encerclement de la Russie par l’OTAN. Il faut aussi tenir compte du fait que la carte du patriotisme russe est la dernière qui reste à jouer à Poutine pour garder un semblant de légitimité aux yeux de son peuple et masquer le bilan catastrophique de son régime sur le plan social et économique. Mais cette carte, justement, il l’a jouée à un point tel qu’il ne pourrait désormais plus reculer, et si le gouvernement illégitime ukrainien devait vraiment commencer une opération militaire d’envergure contre ses opposants, la Russie serait amenée à intervenir pour les défendre, ce qui déboucherait sur une guerre entre l’Ukraine et la Russie.

Il n’est pas encore trop tard pour empêcher la guerre. Pour cela, il faut que le gouvernement putschiste ukrainien désarme les bandes néo-nazies, libère tous les prisonniers politiques et accède aux justes demandes des populations de l’Est et du Sud de l’Ukraine, une autonomie accrue pour les régions et une fédéralisation du pays.

Enfin, le Parti du Travail tient à exprimer sa solidarité avec le KPU, qui doit lutter dans des conditions très difficiles, en butte aux persécutions de l’extrême-droite, mais qui porte depuis longtemps avec courage la seule perspective qui réponde aux intérêts et aspirations du peuple ukrainien : la fédéralisation du pays, la nationalisation des biens mal acquis par les oligarques, le socialisme.