19 juin 2013

Quand c’est un « socialiste » qui démantèle les retraites…


Communiqué de presse du Parti du Travail, rédigé par moi

C’est avec consternation, mais sans trop de surprise, que le Bureau du Parti du Travail a pris connaissance, suite à une fuite révélée ce dimanche par le Sonntagsblick, des mesures prévues dans les « Lignes directrices de la réforme de la prévoyance viellesse 2020 » préparées par les services du conseiller fédéral Alain Berset, et que ce dernier devrait rapidement soumettre à ses collègues, avant un prochain débat au parlement. Nous estimons que ce projet est un démantèlement, parfaitement scandaleux, à la fois de l’AVS et de la LPP.

L’arguments des « coûts » qu’il faudrait « réduire » pour « assurer la pérénité des rentes » est parfaitement fallacieux : en 2008, le Conseil fédéral n’a pas hésité à sauver l’UBS en difficulté à coups de milliards de fonds publics sans même consulter le parlement. C’est que, pour garantir les profits des banquiers et les bonus des tops-managers l’argent ne manque pas ! Par contre, les retraités, eux, devraient accepter de faire des sacrifices. En réalité, tout le discours à géométrie variable sur les nécessaires économies est parfaitement démagogique et hypocrite. Il ne réfléte aucune nécessité d’intérêt général, mais sert des intérêts de classe étroits d’une toute petite minorité possédante : faire payer le maintien et l’extension des privilèges des maîtres du capital aux classes populaires. Le Parti du Travail combat cette politique anti-populaire des représentants politiques de la classe possédante, et lutte pour une autre politique à la fois nécessaire et possible : une politique au service des classes populaires et du progrès social.

Nous estimons particulièrement scandaleuse la proposition du conseiller fédéral Berset de réduire le taux de conversion des rentes du deuxième pillier à 6%, ce alors que 72,7% des citoyens suisses, et tous les cantons, ont refusé la baisse à 6,4% en 2010. Mais, à l’évidence, le Conseil fédéral n’a cure de la volonté, pourtant claire, du peuple souverain, et veut remettre le vol des rentes. Et bien entendu, dès lors qu’il s’agit d’un acquis social, on entend pas l’UDC, si scandalisée à chaque fois qu’une de ses initiatives inapplicables n’est pas immédiatement assorite d’une loi d’application, protester contre ce mépris flagrant du vote populaire. Le XIXème Congrès du Parti Suisse du Travail avait annoncé le premier le référendum contre le vol des rentes, alors que le PSS et les syndicats avaient quelques hésitations. Ce rôle déclancheur de notre parti a été par la suite oublié, mais nous n’hésiterons pas à le refaire une deuxième fois.

Tout aussi inacceptables sont les proposition de réduire le financement de l’AVS à travers le budget fédéral et d’augmenter la TVA de deux points, de réduire les droits en matière de retraite flexible ou d’augmenter l’âge de départ à la retraite pour les femmes. La TVA est une taxe particulièrement injuste, car elle frappe tout le monde au même taux, indépendemment du revenus, et donc réduit beaucoup le pouvoir d’achat des classes populaires, tout en étant presque indolore pour les riches. C’est la raison pour laquelle le Parti du Travail s’était battu contre l’introduction de la TVA, et se battra contre toute hausse de celle-ci (c’est aussi la raison pour laquelle les partis bourgeois aiment tellement l’idée de remplacer l’imposition directe par des taxes).

Le Parti du Travail s’opposera résolument à toute hausse de l’âge de départ à la retraite sous quelque forme que ce soit. Nous rejettons l’argument selon lequel il faudrait travailler plus longtemps du fait de l’augmentation de l’espérance de vie comme étant totalement mensonger. Bien entendu, la proportion de retraités par rapport aux actifs a cru depuis l’instauration de l’AVS. Mais la productivité du travail a cru de manière bien plus importante depuis. Donc, le problème que soulève la droite n’en est en réalité pas un. En outre, cet argument vaudrait quelque chose s’il n’y avait pas de chômage et qu’au contraire l’économie manquait de main-d’œuvre. Or actuellement le chômage est elévé, et beaucoup de gens ne peuvent pas trouver de travail. Et on voudrait encore augmenter le taux de chômage en reculant l’âge de départ à la retraite ? Décidément, il faut être un technocrate néolibéral pour trouver une telle solution cohérente.

En outre, les propositions de démantèlement de l’AVS sont particulièrement inacceptables justement parcqu’une véritable solution aux problèmes de rendement du deuxième pillier ne peut passer que par un renforcement de l’AVS. En 1973 déjà, le Parti du Travail avait expliqué que le système des trois pilliers serait inefficace et excessivement cher, que le deuxième pillier, outre qu’il soit fortement inégalitaire, serait une vaste escroquerie qui ne profiterait qu’au capital financier disposant librement de l’argent de retraités pour des opérations spéculatives mais avec lequel aucun retraité ne pourrait avoir la garantie de ne pas perdre son capital dans les aléas des marchés financiers. Les faits nous donnent amplement raison aujourd’hui. Il est grand temps, si bien sûr on pense au bien des retraités plutôt que du capital financier (ce qui visiblement n’est pas le cas du conseiller fédéral Berset), de mettre en place un système de retraites par répartition intégrale, de véritables retraites populaires, ce qui passe nécessairement par un renforcement de l’AVS. L’initiative AVS+ est un indispensable premier pas dans cette direction, mais ce n’est pas suffisant, et c’est pourquoi le Parti du Travail réfléchit à une initiative populaire pour une fusion de l’AVS et du deuxième pillier.

Et dire que c’est un conseiller fédéral « socialiste » qui organise un démantèlement programmé des retraites, juste après que sa « camarade » Sommaruga ait activement contribué à faire passer une révision hautement xénophobe de la loi sur l’asile ! De quoi pousser le PS à s’interroger sur ses propres contradictions : à quoi bon être représenté au Conseil fédéral par deux des siens, si c’est pour qu’ils conduisent une politique que le PS, s’il veut rester un tant soit peu fidèle à ses principes déclarés, doit combattre ?