26 mai 2012

Discours au 21ème Séminaire communiste international

Discours que j'ai prononcé au nom du Parti Suisse du Travail au 21ème Séminaire communiste international de Bruxelles, la plus grande rencontre au sommet entre partis communistes à ce jour et qui a réuni 59 partis cette année.


Chères et chers camarades,

 Tout d’abord, je souhaiterais remercier le Parti du Travail de Belgique pour l’organisation de ce 21ème Séminaire communiste international autour d’une question d’une grande actualité et d’une importance fondamentale pour le mouvement communiste international. Car la crise systémique que le capitalisme traverse actuellement est à la fois lourde de menace et source d’opportunités. Elle présente des défis majeurs aux communistes. Dans cette situation difficile, il est plus important que jamais de savoir articuler de façon juste les tâches immédiates qui se présentent aux partis communistes à la lutte pour le socialisme. Il n’y a que deux sorties possibles de la crise : une sortie dans l’intérêt du capital et de l’impérialisme, ou une sortie dans l’intérêt des peuples et des travailleurs. La bourgeoisie ne peut imposer une sortie de la crise conforme à ses intérêts qu’à un prix terrible à payer par les peuples : un durcissement de l’exploitation capitaliste, une détérioration brutale des conditions de vie des classes populaires et des classes moyennes, des massives et dévastatrices guerres impérialistes. La responsabilité des communistes est de lier les luttes immédiates à la lutte fondamentale pour la seule sortie de la crise dans l’intérêt des travailleurs qui soit possible ; c’est-à-dire le socialisme.

 La question posée par le séminaire ne peut trouver une réponse simple et unique, vraie pour tous les pays et tous les temps. Celle-ci dépend des conditions propres à chaque pays. Les tâches concrètes, immédiates, qui se présentent aux communistes son imposées par les nécessités de la lutte et les circonstances particulières d’un pays donné à un moment donné. La voie vers le socialisme ne peut pas non plus ne pas être différente pour des pays qui sont différents par leur histoire, leur structure économique, leur culture et leur position internationale. Lénine disait : «Tous les peuples viendront au socialisme – ceci est inévitable  –, mais tous les peuples ne viendront pas au socialisme par une voie qui sera exactement la même ; chaque peuple adoptera son approche dans la direction de tel ou tel type de démocratie, dans la direction de tel ou tel type de dictature du prolétariat, dans la direction de tel ou tel type de rééducation de la société en termes de différents aspects de la vie sociale. » La voie vers le socialisme doit être conçue pour chaque pays donné selon les conditions concrètes, les particularités nationales, la structure économique, l’histoire et la culture de ce pays. Il ne serait ni marxiste ni matérialiste de procéder autrement.

 Le Parti Suisse du Travail a mené une réflexion théorique et stratégique approfondie sur les tâches immédiates qui se présentent à lui et sur comment les lier avec une voie vers le socialisme conforme aux conditions spécifiques de la Suisse. La Suisse est en effet un des pays les plus riches et les plus stables du monde capitaliste. La bourgeoisie suisse a réussi à créer un système politique unique au monde, fondé sur la participation de tous les partis importants au gouvernement en permanence  proportionnellement à leur représentation au parlement, ce qui assure une stabilité exceptionnelle au système politique, l’intégration totale de tous les partis aux institutions bourgeoises et la marginalisation de toute opposition réelle, dans l’illusion de divergences fondamentales entre les partis qui participent pourtant au même gouvernement. Ce système est cimenté par l’idéologie du consensus, c’est-à-dire d’une harmonie illusoire entre classe et d’une collaboration entre les partis, dans la négation de la lutte et du conflit. Ce système, cette idéologie du consensus et des droits démocratiques réels d’initiative et de référendum qui permettent aux classes populaires de faire opposition aux décisions de la bourgeoisie, voire de lui imposer parfois leur volonté, donnent naissance à une idéologie conservatrice de la meilleure démocratie possible déjà existante et d’un système harmonieux qu’il serait trop risqué de changer, même dans ses aspects les plus secondaires. Le Parti socialiste, et les syndicats majoritairement contrôlés par lui, portent une lourde responsabilité dans l’établissement de ce consensus conservateur. Le Parti socialiste a abandonné tout discours revendicatif pour s’intégrer aux institutions bourgeoises et participer au gouvernement avec la droite. Il défend désormais l’ordre social et politique établi contre de vrais progrès sociaux et démocratiques. Les syndicats sociaux-démocrates ont signé en 1939 les accords dits de la «paix du travail», qui limitent drastiquement le droit de recours à la grève et remplacent la lutte par la collaboration de classe. La «paix du travail» a permis à la bureaucratie syndicale de s’intégrer à la société capitaliste au prix d’un affaiblissement dramatique du syndicalisme suisse et d’une perte catastrophique de la conscience de classe et des traditions de lutte des travailleurs. Mais ce consensus n’aurait jamais pu avoir lieu sans des salaires comparativement élevés pour les citoyens suisses et que le patronat suisse a pu payer grâce à l’avantage que lui offrait un potentiel productif intact aux lendemains de la deuxième Guerre mondiale, mais aussi  au recours massif à une main-d’œuvre étrangère sous-payée et sans droits. Aujourd’hui toutefois ce consensus conservateur se fissure : le chômage augmente et les bas salaires se généralisent ; la stabilité du système politique est mise à mal par l’UDC, un parti d’extrême-droite, devenu désormais le premier parti du pays, et qui privilégie le conflit sur le consensus.

 Dans ces conditions, la première tâche du Parti Suisse du Travail est de briser le consensus étouffant imposé par la bourgeoisie, afin de changer le rapport de force en faveur des classes populaires, ce qui est un préalable nécessaire pour la construction du socialisme. Nous estimons que la seule voie pour l’organisation des travailleurs et de toutes les classes antimonopolistes, leur unité dans la lutte et leur conscientisation politique passe par la participation, et si possible la direction, par le Parti Suisse du Travail de lutte immédiates et concrètes qui répondent aux aspirations, aux intérêts et au niveau actuel de la conscience des classes populaires. Contrairement à la plupart des pays d’Europe, la Suisse n’est pas touchée par des politiques d’austérité, parce qu’elle n’est pas, ou pas encore, durement touchée par la crise, parce qu’elle n’a presque pas de protection sociale, dont les hauts salaires compensaient autrefois en partie l’absence, et parce que la droite suisse s’emploie depuis des années à démanteler progressivement les acquis sociaux qui existent. Notre première tâche immédiate est de faire échec au projet de démantèlement social de la bourgeoisie, mais aussi de lutter pour l’extension des acquis sociaux et des droits démocratiques du peuple. Un autre objectif fondamental est de mener un travail d’organisation dans les syndicats pour les détacher de l’emprise de la social-démocratie, de briser la «paix du travail» et de leur donner une ligne de lutte de classe. Notre lutte passe aussi nécessairement par la lutte parlementaire et dans les exécutifs. Dans les conditions de la Suisse où les institutions démocratiques bourgeoises sont stables et sont reconnues légitimes par une large majorité de la population, et où des droits démocratiques réels existent, nous considérons qu’il est nécessaire et possible de mener dans ces institutions une lutte réelle pour les intérêts des travailleurs et de leur donner un contenu réellement démocratique. Nous considérons qu’une juste combinaison des luttes parlementaires et extraparlementaires, des luttes concrètes qui répondent aux aspirations et au niveau de conscience politique du peuple, est la seule voie pour organiser les masses populaires dans la lutte, la réalisation de l’unité concrète de toutes les classes antimonopolistes, de briser l’hégémonie idéologique bourgeoise, de la remplacer par une hégémonie des idées communistes, grâce à une propagande qui ne peut être efficace que si elle est associée aux luttes réelles, de construire enfin une majorité populaire soudée autour du Parti Suisse du Travail qui est la pré-condition nécessaire pour l’établissement d’une démocratie populaire et la construction d’une société socialiste. Etant donnée la stabilité du régime bourgeois en Suisse, nous devons concevoir notre lutte pour le socialisme comme un processus de longue durée.

 Mais il va de soi que les lutes sociales et parlementaires n’ont un contenu révolutionnaire et ne servent la cause du socialisme que si elles sont menées par un parti communiste qui fonde son action sur la pensée de Marx, Engels et Lénine, qui explique les vrais enjeux des luttes et qui les place dans la perspective du socialisme, qui n’oublie pas en travaillant dans les parlements que l’Etat bourgeois est un appareil de domination aux mains de la bourgeoisie. Autrement, les luttes les plus justes sont justifiées avec des arguments erronés et dévoyées vers le réformisme, et les luttes parlementaires mènent à une intégration dans les institutions bourgeoises et dégénèrent en social-démocratie.

24 mai 2012

Pour une articulation révolutionnaire : des luttes immédiates à la construction du socialisme

Contribution que j'ai rédigé au nom du Parti Suisse du Travail pour le 21ème Séminaire communiste international de Bruxelles, la plus importante rencontre entre partis communistes aujourd'hui qui a réuni 59 partis communistes et ouvriers cette année.


La question de la relation des tâches immédiates et de la lutte pour le socialisme qui se pose à tous les communistes est une question complexe et hautement fondamentale. Car une réponse juste à celle-ci est une condition sine qua non, un critère essentiel, si ce n’est le seul, pour qu’un parti puisse être considéré comme un véritable parti communiste. En effet, toute mauvaise réponse à cette question, toute articulation erronée entre ces deux aspects, ou toute absence de vraie articulation entre eux mène nécessairement à des erreurs politiques majeures et à une perte de consistance stratégique de la ligne générale, rendant tout objectif révolutionnaire illusoire. Pourtant, la réponse à cette question n’a rien de simple. Elle dépend de la nature des tâches immédiates qui se posent à un parti communiste et la façon dont il conçoit sa lutte pour le socialisme. La façon de lier ces tâches immédiates à la lutte pour le socialisme dépend de la façon dont un parti communiste envisage la lutte pour le socialisme, dépend de comment il conçoit la rupture révolutionnaire avec la société capitaliste, de la forme que la révolution socialiste doit prendre. Il ne serait y avoir de réponses simples ni uniques à ces questions. Elles dépendent étroitement pour chaque parti communiste des conditions concrètes et des particularités nationales du pays dans lequel il lutte. Le Parti Suisse du Travail a consacré une réflexion théorique et stratégique approfondie à cette question, y apportant une réponse correspondant aux conditions qui sont celles de la Suisse. Pour détailler cette réponse, il convient d’abord d’esquisser à grands traits la situation suisse et l’histoire du Parti Suisse du Travail, qui déterminent et expliquent sa pratique et sa pensée.
 

Les conditions concrètes de la Suisse

 Fondé en 1944, dans des conditions d’interdiction du Parti communiste par un Etat en pleine dérive policière et allié de facto à l’Allemagne nazie pendant la Guerre, par les membres de l’ancien Parti communiste suisse d’Avant-guerre, un scission de gauche du Parti socialiste suisse, et de nombreux militants  non affiliés à un parti jusque là, le Parti Suisse du Travail n’a jamais réussi à devenir une force politique importante à l’échelle de la Suisse, bien qu’il l’ait été, et parfois l’est encore, à l’échelle locale à certains endroits du pays, en Suisse francophone principalement. Depuis la fin des années 80, le Parti Suisse du Travail a durement souffert de la crise du mouvement communiste international consécutive à la chute du camp socialiste, et s’est nettement affaibli encore du fait, jusqu’à mettre son existence même en danger, d’une baisse importante du nombre ses membres, des évolutions politiques différentes de ses sections cantonales et de flottements majeurs au niveau de sa ligne politique. Aujourd’hui, le Parti Suisse du Travail est déchiré par une lutte de tendances, allant de la social-démocratie de gauche au marxisme-léninisme orthodoxe, et peine à se reconstruire en l’absence d’une majorité claire au Comité central. Si le Parti Suisse du Travail n’a jamais vraiment réussi à émerger au niveau national, et qu’il est devenu si faible aujourd’hui, c’est à cause d’erreurs de sa part sans doute, mais aussi du fait des conditions suisses, qui sont particulièrement défavorables pour un mouvement révolutionnaire.


 La Suisse est l’un des pays les plus riches et les plus stables du monde. Un des seuls pays où la révolution libérale de 1848 ait triomphé, la Suisse a connu dès lors un régime bourgeois démocratique sans interruption (si l’on excepte la période de la deuxième Guerre mondiale, durant laquelle les libertés démocratiques bourgeoises ont été restreintes, mais non abolies, et où le parlement élu est resté en place, bien que le gouvernement ait reçu les pleins pouvoirs), n’a jamais été en guerre depuis cette date. La stabilité du système politique suisse, l’élection au système proportionnel depuis le début du XXème siècle, l’existence de droits démocratiques sans équivalents dans la plupart des pays du monde que sont le droit de référendum (la possibilité de mettre en votation populaire une loi contre la récolte de 50'000 signatures au niveau national, de même avec proportionnellement moins de signatures aux niveaux cantonal et communal), le droit d’initiative (modifier la constitution en mettant en votation populaire un nouvel article constitutionnel contre la récolte de 100'000 signatures au niveau national, de même au niveau cantonal avec proportionnellement moins de signatures, avec même la possibilité de modifier une loi par voie d’initiative dans certains cantons) qui constituent des réels bien qu’insuffisants contrepoids populaires au pouvoir de la bourgeoisie, la collaboration de la gauche sociale-démocrate et verte avec les partis bourgeois, ont permis d’entretenir l’illusion de la démocratie réelle. Grâce à la haute conjoncture dans l’Après-guerre, l’avantage que possédait la Suisse de posséder un appareil productif intact, l’exploitation massive de la main-d’œuvre étrangère privée de droits politiques et licenciable à merci, la bourgeoisie suisse a pu pendant longtemps maintenir pour les citoyens suisses un chômage bas et des salaires relativement élevés ; ce qui est nettement moins le cas aujourd’hui, même si globalement le chômage reste plus bas et les salaires plus élevés qu’en Union européenne. La combinaison de ces facteurs a permis à la bourgeoisie suisse de maintenir l’illusion d’une démocratie suisse parfaite et d’une communauté d’intérêts entre les classes au sein d’un système globalement harmonieux. L’hégémonie idéologique de la bourgeoisie est tellement forte que le peuple suisse vote très souvent contre ses intérêts les plus évidents en votations populaires.
 Grâce à la complicité active du Parti socialiste suisse, et des syndicats contrôlés par celui-ci, la bourgeoisie suisse a réussi à faire rentrer dans la tête des gens une idéologie conservatrice taillée sur mesure pour assurer sa domination dans la stabilité : l’idéologie du consensus, à savoir une idéologie de la négation des conflits et de la lutte des classes, au profit d’une entente illusoire entre les classes et d’une entente mutuelle qui exclut toute remise en cause du système, sensé être le garant de cet ordre parfait, même dans ses aspects les plus secondaires. Le Parti socialiste suisse a renoncé dès la fin des années trente au marxisme et à toute velléité transformatrice de la société, et participe sans interruption depuis les années cinquante au gouvernement, qui comprend des représentants de tous les groupes parlementaires proportionnellement à leur nombre. Grâce à cette stabilité unique en Europe, la bourgeoisie suisse a pu éviter les tares du présidentialisme et du bipartisme, et conserver un système parlementaire «sain» avec plusieurs partis importants qui conservent des différences idéologiques assez notables entre eux. Les syndicats, dans leur majorité liés au Parti socialiste, ont accepté en 1939 la dite «paix du travail», c’est-à-dire un abandon de la lutte des classes et de l’usage de la grève, sauf en cas de rupture de négociations, au profit d’une pratique de collaboration de classe avec le patronat, et l’abandon d’un syndicalisme de lutte par une bureaucratie syndicale qui a préféré s’installer confortablement au sein de la société capitaliste. Cette pratique de collaboration de classe a beaucoup affaibli le syndicalisme suisse, qui peine à s’en remettre, et a fait perdre à la classe ouvrière toute son indispensable culture de lutte.
 Ce système suisse, si stable et conservateur, est particulièrement hostile aux idées communistes. Ceci dit, ce système commence à se fissurer, ouvrant des nouvelles perspectives pour l’action du Parti Suisse du Travail. Les conditions favorables de l’Après-guerre n’étant plus, et la crise systémique du capitalisme étant là, le patronat suisse ne peut plus et ne veut plus offrir les salaires relativement hauts d’autrefois. Le chômage augmente et les bas salaires se généralisent. Avec cet accroissement de l’exploitation capitaliste, les contradictions entre classes augmentent également. Les licenciements collectifs et les baisses de salaire brutales forcent les travailleurs à lutter pour leurs droits et à retrouver une conscience de classe. Une politique de «paix du travail» est devenue impossible, et les syndicats sont forcés de retourner à un syndicalisme plus combatif, même si l’influence du PS se fait toujours lourdement et négativement sentir. La généralisation des bas salaires rend plus insupportable l’inexistence d’une véritable protection sociale. Le système politique et l’idéologie bourgeoise paraissent relativement stables, mais ils commencent à se fissurer aussi. La crise actuelle, la dégradation de la situation économique en Suisse, le sauvetage des banques à coups de milliards, ont mené à une remise en cause critique du système capitaliste de la part de larges couches de la population, qui deviennent de ce fait plus réceptives aux idées communistes. Le système politique suisse se ressent de ces changements, et a perdu sa stabilité d’antan il y a une dizaine d’années déjà, du fait de la montée d’un parti d’extrême-droite, l’UDC, qui n’était auparavant et sous un autre nom qu’un parti conservateur et minoritaire, mais qui est devenue aujourd’hui le premier parti du pays en réussissant à dévoyer un vote réel de protestation vers un programme démagogique et réactionnaire, et qui bien qu’à mi-chemin entre la droite conservatrice et l’extrême-droite à proprement parler, est devenue un modèle explicite pour nombre de partis d’extrême-droite du continent.

Les réponses stratégiques du Parti Suisse du Travail


 
 Etant données les conditions de la Suisse, décrites ci-dessus, le Parti Suisse du Travail a envisagé une voie vers le socialisme correspondant aux conditions concrètes de la Suisse et dans le cadre de laquelle la question de la relation entre les tâches immédiates et la lutte pour le socialisme trouve sa réponse. La réflexion du Parti Suisse du Travail part de la diversité des situations nationales et de la différence des solutions révolutionnaires qui en résultent. En effet, la voie vers le socialisme ne peut être la même dans des pays aux histoires, situations économiques, systèmes politiques et cultures radicalement différentes. La voie vers le socialisme ne peut être définie a priori, selon des schémas préconçus, ou copiés mécaniquement d’un précédant historique. Elle doit être, pour chaque pays donné, conçue selon les conditions de ce pays. En particulier, la Révolution d’octobre a pu prendre la forme qu’elle a prise dans un contexte d’effondrement de l’Etat tsariste accélérée par la première Guerre mondiale, de la décomposition totale de l’ancienne classe dirigeante féodale sans que la bourgeoisie soit mûre pour créer son propre Etat. Toutes les autres révolutions socialistes du XXème siècle ont eu lieu dans le cadre d’une guerre de libération nationale contre une occupation étrangère coloniale, fasciste ou néocoloniale. Or en Suisse nous n’attendons pas un effondrement de l’Etat ni bien sûr une guerre de libération nationale. Les institutions démocratiques bourgeoises sont stables et devraient le rester. Elles ne devraient pas non plus connaître un discrédit brutal. 
 

 Dans ces conditions, le Parti Suisse du Travail ne peut concevoir sa lutte que comme une lutte à long  terme, qui devra avoir lieu pendant un temps assez long encore sous le régime capitaliste et dans le cadre des institutions démocratiques bourgeoises. Les tâches immédiates qui se présentent à nous ont donc un lien direct avec notre lutte pour le socialisme : elles représentent la seule voie pour unir progressivement toutes les classes antimonopolistes en une majorité populaire unie sous la direction politique du Parti Suisse du Travail afin de pouvoir réellement remplacer la domination bourgeoise par une authentique démocratie populaire et construire une société socialiste. En effet, le Parti Suisse du Travail n’a jamais réussi à être fort que là et lorsqu’il a réussi à mener avec succès des luttes concrètes répondant aux intérêts et aux aspirations des classes populaires et qui ont constituées des avancées significatives pour celles-ci. Au nombre de ces combats, citons, parmi les plus emblématiques, les vacances payées, que le Parti Suisse du Travail a pu imposer contre les partis bourgeois dans plusieurs cantons par voie d’initiative populaire, ce jusqu’à ce que le parlement fédéral enlève aux cantons la possibilité de légiférer sur les vacances payées ; ainsi que la lutte pour des retraites populaires : le Partis Suisse du Travail a réussi par sa lutte à obtenir enfin en 1948 l’AVS, un système de retraites par répartition, qui bien qu’insuffisant pour vivre constituait déjà une avancée énorme. En 1971, le Parti Suisse du Travail lançait une initiative populaire pour des véritables retraites ouvrières, un système de retraites par répartition qui permettent de vivre dignement. Il perdit en votation populaire à cause de la trahison du PS et des syndicats qui ont appelé à voter contre pour par la suite négocier avec les partis bourgeois un système hybride, joignant à l’AVS un système de prévoyance professionnelle par capitalisation, bien plus cher que le système que le Parti Suisse du Travail proposait, inégalitaire et actuellement menacé par la crise financière mondiale. Aujourd’hui, notre Parti envisage de relancer peut-être une initiative populaire pour fusionner la prévoyance professionnelle avec l’AVS dans un système par répartition intégrale.

 De tels combats concrets dans le cadre même de la société capitaliste constituent le seul moyen d’unir réellement toutes les classes antimonopolistes dans la lutte, de forger peu à peu leur unité et leur conscience de classe, de permettre aux classes populaires d’acquérir une expérience de lutte nécessaire pour un jour prendre et exercer le pouvoir, de donner au Parti Suisse du Travail l’audience et l’influence nécessaire pour devenir un parti national puissant et présent dans le pays tout entier, qui seul peut un jour jouer le rôle révolutionnaire qui est le sien. Ainsi, le combat pour des retraites populaires a permis au Parti Suisse du Travail de créer l’AVIVO, l’association de défense des retraités, qui est aujourd’hui devenue une organisation de masse, où le Parti Suisse du Travail continue d’exercer, malgré sa faiblesse, une présence forte et une influence déterminante, et qui a conservé, du moins en grande partie, la ligne combative de classe qu’il a pu y imprimer. Des luttes concrètes de ce type sont aussi le seul moyen de briser l’hégémonie bourgeoise et construire une hégémonie pour les idées communistes autour du Parti Suisse du Travail. La seule propagande pour le socialisme ne suffit pas, ou plutôt elle n’est pas efficace si elle n’accompagne pas des luttes réelles, correspondantes aux aspirations immédiates des travailleurs, si elle ne s’inscrit pas dans leur cadre et ne constitue pas leur prolongement. Les luttes concrètes donnent au parti communiste qui les mène l’occasion d’expliquer les enjeux réels et la nécessité du socialisme pour résoudre vraiment les problèmes que ces luttes posent ; elles lui offrent une audience pour diffuser ses journaux, ses publications, pour assister à ses assemblées publiques et entendre son discours. Parmi les tâches immédiates des communistes figurent bien sûr aussi le travail parlementaire et dans les exécutifs locaux. Dans un pays comme la Suisse où les parlements ont de vraies prérogatives et sont reconnus comme l’émanation légitime de la démocratie par une large majorité de la population, il est nécessaire de prendre le travail parlementaire au sérieux, et d’utiliser toutes les possibilités qu’offrent la participation parlementaire et aux exécutifs locaux pour obtenir des progrès réels pour les classes populaires, tout en veillant à ne jamais se laisser engluer dans la routine parlementaire, et de toujours mener une politique d’opposition résolue et conséquente face à toutes les décisions contraires aux intérêts des travailleurs votées par les parlements, sans jamais oublier dans ces circonstances de dénoncer le caractère limité de la démocratie bourgeoise et le caractère de classe de ses institutions.

 Bien entendu, les luttes concrètes n’ont un caractère révolutionnaire et ne servent la cause du socialisme que si elles sont menées par un parti communiste conséquent, qui fonde son action sur la pensée de Marx, Engels et Lénine, et sur une analyse marxiste approfondie des conditions nationales dans lesquelles il lutte, et qui place ses luttes dans la perspective du socialisme et les accompagne d’une propagande conséquente et efficace. Sans cela, les luttes les plus justes sont menées avec des arguments erronés et sont dévoyées vers l’économisme et le réformisme sans perspective et sans consistance, la participation parlementaire dérive vers la social-démocratie et la défense des institutions bourgeoises. « Sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire… Seul un parti guidé par une théorie d’avant-garde peut remplir le rôle de combattant d’avant-garde. » disait Lénine. Seul un parti communiste qui fonde sa lutte politique sur une théorie révolutionnaire conséquente peut espérer réunir autour de lui une majorité populaire nécessaire pour construire une société socialiste.

Perspectives révolutionnaires en Europe et mondiales

 La crise systémique que traverse actuellement le système capitaliste mondial est à la fois terrifiante et pleine de promesses.  Elle est terrifiante dans la mesure où elle représente une dégradation brutale des conditions de vie de millions de travailleurs de par le monde, dans la mesure où elle débouche sur des politiques de réaction sur toute la ligne et dans la mesure où elle mène à une aggravation brutale des contradictions inter-impérialistes, à des nouvelles et plus nombreuses guerres d’agressions pour le contrôle des ressources, à une menace de guerre globale. La première tâche immédiate du mouvement communiste international est en ce sens la lutte contre l’impérialisme, contre les guerres impérialistes et pour la défense de la paix. Cette lutte, qui est une lutte contre l’impérialisme qui est le garant d’un ordre mondial réactionnaire et le pire ennemi des peuples qui cherchent un autre avenir, est aussi, et immédiatement, une lutte pour le socialisme .

 Mais la crise mondiale du capitalisme est aussi une opportunité pour les communistes pour donner la seule réponse politique aux peuples qui ne veulent plus supporter l’austérité perpétuelle et l’escalade militaire. Le mouvement communiste international a la responsabilité et le devoir envers les classes populaires d’imposer une sortie progressiste de la crise. Actuellement, en Europe, le principal obstacle aux solutions progressistes, mais aussi le maillon faible de l’ordre capitaliste, est l’Union Européenne et sa monnaie unique. L’Union Européenne, édifiée comme construction technocratique et anti-démocratique, est une véritable chape de plomb néolibérale et une machine de guerre contre les peuples. Ses structures, avec ses fonctionnaires nommés et hors de tout contrôle démocratique, ses chefs d’Etat nommés et l’hégémonie allemande la rendent irréformable. L’Euro, monnaie unique sous contrôle d’une banque centrale liée aux marchés financiers et au-dessus de tout contrôle démocratique, rend impossible tout changement de cap dans les pays membres de la zone Euro. C’est pourquoi, la tâche majeure des communistes dans les pays européens est la lutte contre l’Union Européenne, la lutte pour la sortie de leurs pays respectifs de l’Union Européenne, pour le démantèlement de celle-ci. C’est d’ailleurs aussi une lutte du Parti Suisse du Travail, une lutte contre la reprise systématique du droit européen et les accords avec l’Union européenne qui instaurent les normes néolibérales et anti-démocratiques de la Commission européenne en Suisse, la lutte aussi contre l’européisme béat du Parti socialiste suisse, qui désire toujours voire adhérer la Suisse à l’Union européenne. Il faut combattre résolument l’idée absurde de certains partis communistes de refonder l’Union européenne et l’Euro sur une base progressiste. De par la loi du développement inégal sous le capitalisme, il ne peut y avoir de révolution mondiale, ni même européenne. Les situations économiques des différents Etats membres de l’Union européenne sont trop différentes, les situations politiques encore plus. Or toute réforme de l’Union européenne exige l’unanimité des 27 pays membres. Dans ces conditions, défendre l’Union européenne et l’Euro revient à refuser de facto tout changement de l’ordre établi. Il ne peut y avoir de lutte réelle pour le socialisme sans lutte contre l’Union Européenne et l’Euro. Mais la lutte contre l’Union européenne et l’Euro est aussi une lutte pour le socialisme. Dans plusieurs pays d’Europe  soumis à l’euro-austérité, existe une situation de discrédit total des partis bourgeois et sociaux-démocrates, de contestation populaire et d’instabilité politique qui peut déboucher sur une situation révolutionnaire. Dans les circonstances actuelles il est du devoir de tous les communistes d’être à la hauteur des défis que présente la crise du capitalisme, pour déjouer la menace du fascisme qui plane avec la montée de l’extrême-droite en Europe et d’imposer une sortie socialiste de la crise.

14 mai 2012

Plateforme politique et stratégique du Parti du Travail







Programme adopté par l’Assemblée générale du 12 mai 2012, suite aux délibérations du Congrès extraordinaire du 5 novembre 2011 du Parti du Travail genevois, d'après un projet initial rédigé par mes soins et amendé par la suite au cours d'un travail collectif auquel j'ai activement participé.



I. Préambule


§1       L’humanité entière est aujourd’hui arrivée à un point critique de son histoire. La Terre est déchirée par des contradictions plus brutales et plus profondes que jamais auparavant. Les progrès de la science et de la technique dépassent de loin ce qui était simplement imaginable jadis. La masse de richesses accumulées et la capacité de production de l’humanité battent tous les records. Mais cette richesse fabuleuse est concentrée entre les mains d’une poignée de milliardaires, alors que presque un milliard de personne meurt de faim. Il serait aujourd’hui possible de nourrir facilement 11 milliards de personnes, mais les grandes puissances impérialistes, incapables de trouver les sommes relativement modiques pour supprimer la famine et la misère, préfèrent consacrer des moyens des dizaines de fois plus considérables pour renflouer les banquiers qui ont plongé le monde dans la crise, et pour des guerres néocoloniales qui tuent des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, et transforment la vie des survivants en enfer.
§ 2      Les milliers de milliards investis dans le luxe indécent des maîtres du monde, dans les guerres impérialistes sans fin, dans la consommation effrénée et ostentatoire des classes moyennes occidentales, le productivisme irrationnel dicté par l’exigence de maximisation des profits du capital, tous ces facteurs épuisent les ressources de la planète, ruinent la biosphère, et menacent à terme la survie même de l’espèce humaine. En même temps des milliards d’êtres humains vivent dans une misère d’un autre âge. Il serait facilement possible de satisfaire les besoins de chacun avec bien moins de ressources. Mais au lieu de cela, la satisfaction des exigences du capital fait office de politique unique pour les partis de droite, et même pour la social-démocratie au pouvoir.
§ 3      Les acquis sociaux sont supprimés les uns après les autres, le patronat baisse de plus en plus les salaires, et même dans les pays riches l’écart des revenus se creuse et la paupérisation relative voire absolue des classes populaires est une réalité massive. La situation est exactement celle que décrivait Lénine il y a un siècle déjà : « Partout, à chaque pas, on se heurte aux problèmes que l’humanité serait à même de résoudre immédiatement. Le capitalisme l’en empêche. Il a accumulé des masses de richesse, et il a fait des hommes les esclaves de cette richesse. Il a résolu les problèmes les plus difficiles en matière de technique, et il a stoppé la réalisation de perfectionnements techniques en raison de la misère et de l’ignorance de millions, en raison de l’avarice stupide d’une poignée de millionnaires. »
§ 4      Depuis sa fondation en 1944, le Parti du Travail est resté invariablement fidèle à la conviction qui fonde son action : cette société  ne peut durer, elle peut et doit être radicalement transformée. Le capitalisme constitue une impasse pour la civilisation et crée des contradictions majeures qui frappent l’humanité : le capitalisme n’est pas réformable. Albert Einstein disait : "L'anarchie économique de la société capitaliste, telle qu'elle existe aujourd'hui, est, à mon avis, la source réelle du mal. (...) Je suis convaincu qu'il n'y a qu'un seul moyen d'éliminer ces maux graves, à savoir, l'établissement d'une économie socialiste, accompagnée d'un système d'éducation orienté vers des buts sociaux". Notre ambition ne se limite pas à chercher une impossible gestion plus «sociale» de la société actuelle, ni d’atténuer les maux du capitalisme par des bricolages réformistes. Notre action politique a pour but de construire une société nouvelle, socialiste, où l’exploitation de l’homme par l’homme soit abolie, et où l’économie serve non pas à l’enrichissement personnel d’une poignée de privilégiés mais au bien commun, afin que le libre développement de chacun soit la condition du libre développement de tous.
§ 5      Le Parti du Travail reconnaît la réalité de la division de la société en classes dont les intérêts sont antagoniques. Il se veut un parti de classe, un parti de la classe ouvrière, de tous les travailleurs dont la force de travail est exploitée pour le profit des possédants, de toutes les classes que le capitalisme opprime. Le Parti du Travail conçoit sa lutte comme une lutte de classe, une lutte de la classe ouvrière et de toutes les classes populaires contre l’oligarchie capitaliste, pour la défense de leurs intérêts légitimes, pour le renversement de l’oppression bourgeoise et l’établissement d’une société socialiste. Le Parti du Travail est un parti communiste qui fonde son action sur la pensée de Marx, Engels et Lénine, et sur toute la tradition marxiste ultérieure, et qui recherche sans cesse un développement créatif du marxisme afin de construire un projet communiste pour la Suisse.
§ 6      Nous considérons que la démocratie bourgeoise est pour l’essentiel une démocratie formelle et limitée, une façade derrière laquelle la bourgeoisie garde le pouvoir réel.  En effet, les formes d’Etats bourgeois sont extrêmement variées, mais leur essence est une : en dernière analyse, tous ces Etats sont, d’une manière ou d’une autre, mais nécessairement, une hégémonie politique, économique et idéologique de la bourgeoisie et du capital. Le passage du capitalisme au socialisme ne peut évidemment manquer de fournir une grande abondance et une large diversité de formes politiques, mais leur essence sera nécessairement une : une hégémonie voulue et consciente de la majorité des travailleurs et des citoyens.
§ 7  Le poids des lobbies à l’Assemblée fédérale, le sauvetage des banquiers à coup de milliards sans passer par la voie démocratique, les attaques incessantes de la droite contre les droits démocratiques ne prouvent que trop éloquemment la pertinence de la théorie marxiste de l’Etat. L’objectif du Parti du Travail est de renverser cette hégémonie de la bourgeoisie et d’établir à la place une démocratie nouvelle, socialiste, qui donne aux classes populaires le pouvoir, tout le pouvoir, dans les faits, et pas uniquement sur papier. Le but de ce pouvoir populaire sera de briser la résistance de la bourgeoisie décidée à défendre ses privilèges par tous les moyens. Nous voulons la socialisation de tous les grands moyens de production, de crédit et d’échange, et les placer sous la supervision d’un organe de planification central, élu et dirigé démocratiquement, afin de les mettre au service du bien commun et de réorganiser la production afin de la rendre compatible avec la préservation de l’environnement et des ressources naturelles.
§ 8      Cette volonté n’empêche pas la subsistance limitée d’un secteur privé dans l’agriculture, l’artisanat, les services et le petit commerce. Mais notre but ultime, idéal, est la construction d’une société communiste, dans laquelle la division de la société en classes aura définitivement disparu, et où la société pourra inscrire sur ses bannières : «de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins. »



II. L’état du monde


La mondialisation capitaliste : de la « fin de l’histoire » à la crise systémique

§ 9      Le renversement du socialisme en URSS et dans les démocraties populaires d’Europe de l’Est, il y a vingt ans de cela, le démantèlement de la République fédérative socialiste de Yougoslavie, le rétablissement des rapports de production capitalistes dans la quasi-totalité de l’ex camp socialiste, l’étouffement de pratiquement toutes les tentatives de construire le socialisme dans des pays d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique latine, ont représenté un recul catastrophique pour la classe ouvrière et les peuples de la planète. Le grand capital et les puissances impérialistes, les Etats-Unis d’Amérique en particulier ont gagné la Guerre froide. Dans l’ex URSS et les démocraties populaires d’Europe de l’Est, le socialisme fut liquidé au profit d’un capitalisme mafieux et d’une bourgeoisie compradore, qui s’est approprié les entreprises d’Etat privatisées à vil prix. Des forces productives considérables furent purement et simplement liquidées pour permettre l’expansion du capital monopoliste occidental
§ 10   La plupart des régimes des pays en développement, qui avaient tenté de garantir leur souveraineté nationale et construire une société, si ce n’est socialiste, du moins un peu plus juste, prirent un tournant néolibéral. Les maigres conquêtes sociales des peuples des anciennes colonies furent réduites à néant par les plans d’ajustement structurel du FMI. Les pays qui aspiraient à l’indépendance et à la souveraineté tombèrent dans le marasme et le chaos, au bénéfice d’un néocolonialisme plus brutal que jamais. Au milieu de ces ténèbres, seule la République de Cuba parvint à préserver sa souveraineté et les acquis du socialisme. La République populaire de Chine, la République socialiste du Vietnam et la République démocratique populaire du Laos ont choisi, pour assurer leur développement économique, de prendre un tournant vers l’économie de marché à orientation socialiste, combinant prédominance d’un secteur étatique et libre développement d’un secteur capitaliste sous régulation par l’Etat et avec l’ouverture aux multinationales occidentales. Depuis, ces trois pays ont connu un développement économique important, mais au prix du rétablissement de l’exploitation capitaliste et d’un creusement abyssal des inégalités. Ils avancent dans un équilibre instable entre volonté de construire une base matérielle suffisante afin de bâtir une société socialiste et menace permanente de rétablissement intégral du capitalisme.
§ 11   Face à ce tableau désolant, les vainqueurs de la Guerre froide, les puissances impérialistes et le grand capital monopoliste, pouvaient crier victoire, et ils l’ont fait avec une arrogance sans bornes.  Les idéologues bourgeois ont répété ad nauseam que toute perspective d’un changement de société était morte, que la chute du camp socialiste signifiait l’échec définitif du projet communiste en tant que tel, la réfutation totale et définitive du marxisme et de toutes les pensées tournées vers l’émancipation, et même de tout projet de gauche autre que le social-libéralisme, l’avenir appartenant définitivement au libre marché. Francis Fukuyama est le représentant le plus emblématique de ce discours, avec sa thèse de la «fin de l’histoire», c’est-à-dire de l’installation définitive des sociétés dans le régime capitaliste.
§ 12   Le néolibéralisme brutal de Reagan et de Thatcher fut érigé en dogme absolu et indiscutable, en pensée unique hors de laquelle il n’y a ni salut ni même pensée possible. La liquidation du socialisme dans les anciennes Républiques populaires et en URSS, la liquidation massive des anciennes entreprises d’Etat imposée par les puissances impérialistes, l’ouverture de la Chine, du Vietnam et du Laos au marché international, le durcissement du néocolonialisme, le tournant pro-occidental et néolibéral de la plupart des régimes nationalistes des pays en voie de développement, ont offert aux grands monopoles multinationaux des nouveaux débouchés très importants et stimulé l’expansion du capitalisme mondial ; le phénomène de mondialisation du capitalisme, présent dès son début a seulement alors pris toute son ampleur et a pour l’essentiel atteint son achèvement.
§ 13   Cette défaite historique eut des répercussions dramatiques sur la conscience de classe de la classe ouvrière, des organisations de classe, des partis de gauche, y compris des partis communistes. La pression idéologique de la bourgeoisie, couplée avec le choc que représentait l’effondrement du camp socialiste, toucha les organisations progressistes et les classes populaires de plein fouet, avec une influence catastrophique sur leur vision du monde et leur ligne politique. L’adversaire soviétique n’étant plus, la social-démocratie, faisant face désormais à des partis communistes affaiblis et souvent désorientés, perdit l’aiguillon qui la poussait à lutter pour un certain progrès social comme antidote à la révolution socialiste, et sombra presque partout dans le social-libéralisme, voire tourna complètement sa veste et mena une politique  identique à celle de la droite, voire pire. Dès les années nonante, ce sont des gouvernements sociaux-démocrates qui ont mené les pires politiques néolibérales, de dérégulation économique, de privatisations et de démantèlement social, que la droite même n’osait pas mener.
§ 14   Les partis communistes furent durement touchés par l’effondrement des pays qui constituaient, sinon un modèle à imiter, du moins des exemples de réussites relatives dans l’édification du socialisme. De plus, la dissolution rapide des partis communistes au pouvoir et la façon dont tant de dirigeants et de militants «communistes» avaient tourné leur veste ont encore aggravé ce constat. Face à la brutalité et à la rapidité avec laquelle le camp socialiste s’est effondré, il devenait difficile de ne pas tomber dans la confusion la plus totale et de continuer à résister aux sirènes de la propagande bourgeoise. Beaucoup de partis communistes en vinrent à rejeter sans nuances les régimes qu’ils avaient soutenus, voire à s’aligner totalement sur l’historiographie bourgeoise et à remplacer l’analyse rationnelle par la diabolisation du socialisme ayant réellement existé. Ce rejet sans nuances des expériences réelles de socialisme ne pouvait que mener au rejet du marxisme-léninisme, qui fondait la pensée des partis communistes au pouvoir, mais aussi à un doute profond quant au marxisme en tant que tel. La quête illusoire d’une refondation du communisme « débarrassé » de l’histoire du mouvement communiste international avec ses hauts et ses bas, et d’un vain et antihistorique retour à la pensée «authentique» de Marx, libérée des prétendues déformations apportées par Lénine et ses successeurs, mena à une confusion idéologique des plus totales. La  lutte contre les «dogmes» a mené à l’abandon de tous les fondements révolutionnaires du marxisme, débouchant sur une pensée vague et ne se distinguant plus guère de la social-démocratie. Les promoteurs les plus zélés (Hue, Martelli, Bertinotti, Gorbatchev, Zisyadis…) de la «refondation» ou de la «mutation» ont d’ailleurs logiquement fini par prôner la liquidation des partis communistes et leur transformation en organisations social-démocrates. Cet affaiblissement des forces du progrès allait laisser le champ libre à la bourgeoisie.
§ 15   Le virage droitier et la confusion idéologique des partis communistes ne pouvaient pas ne pas avoir un impact catastrophique sur la conscience de classe des masses populaires. Les propagandistes bourgeois parvinrent à leur enfoncer dans la tête que le marxisme était mort, qu’avec la chute du camp socialiste tout espoir d’une société plus juste était éteint et que le règne du capitalisme était assuré à tout jamais. La bourgeoisie a même réussi le tour de force d’accréditer la thèse absurde, que, la majorité de la population des pays riches étant employée dans le secteur tertiaire, la classe ouvrière n’existerait plus (comme si la masse des marchandises qui s’amoncellent dans les supermarchés était créée par le Saint Esprit…), et donc qu’il n’y aurait plus de base sociale, ni pour les organisations révolutionnaires, ni pour le syndicalisme de classe, notions désormais désespérément périmées. Ce vide idéologique laissa le champ libre à l’individualisme bourgeois et à l’idéologie publicitaire. Un cas typique de « barbarie douce ».
§ 16   Grâce à un processus de fusion d’entreprises et de concentration du capital à une échelle encore inégalée, quelques grands monopoles dominants des puissances impérialistes ont pu croître démesurément au point d’atteindre des dimensions à l’échelle de la planète et sont devenues les multinationales qui contrôlent l’essentiel de l’économie mondiale et se livrent à une concurrence sans pitié pour un nouveau partage des marchés du globe. La loi du développement inégal fut appliquée avec une brutalité renouvelée. Désormais que le camp socialiste, à la fois alternative à la dictature du capital, rival de l’Empire étatsunien et soutien des luttes des peuples du monde pour leur émancipation, avait disparu, les Etats-Unis devenaient l’unique superpuissance au monde et semblaient pouvoir imposer sans bornes leurs prétentions impériales. Les pays du Tiers monde se retrouvaient à genou et en ruines suite aux plans d’ajustement structurels du FMI et asservis ad aeternam aux intérêts de leur dette, qu’ils avaient pourtant de fait plusieurs fois remboursée. Ils pouvaient être mis en coupe réglée par les puissances impérialistes et livrés à un pillage sans scrupules par les multinationales occidentales, avec la complicité des bourgeoisies compradore locales et des élites politique corrompues et mafieuses, mises en places, soutenues et souvent protégées par les armes des impérialistes.
§ 17   Dans les pays capitalistes développés mêmes, la défaite du camp socialiste signifiait une défaite cuisante pour les travailleurs. Désormais que l’adversaire redouté n’était plus, la bourgeoisie se livra à une véritable campagne de guerre contre les peuples pour revenir sur toutes les concessions auxquelles elles fut contrainte durant la Guerre froide par les luttes populaires et par la menace que l’existence même d’un camp socialiste puissant faisait planer sur ses privilèges. Les partis de droite, les théoriciens libéraux et les médias bourgeois érigèrent le néolibéralisme en dogme absolu et en unique politique possible. Les sociaux-démocrates leurs emboîtèrent le pas. Grâce à ce matraquage, s’imposèrent comme pensée unique et gages incontestés d’une feinte modernité des valeurs qui signifiaient de fait un retour dans des conditions nouvelles au capitalisme sauvage du XIXème siècle : infaillibilité du marché, concurrence libre et non faussée, privatisation, dérégulation, flexibilité, mobilité, compétitivité, déréglementation…Ce culte du marché s’est révélé une machine de guerre redoutable contre les intérêts des travailleurs et pour imposer des politiques favorisant les seuls profits à court terme et l’extension des privilèges exorbitants d’une toute petite élite : baisse des impôts pour les plus riches et les entreprises, démantèlement des assurances sociales sous prétexte des déficits créés par les baisses d’impôts, démantèlement et privatisation des services  publics, dérégulation de l’économie, désengagement de l’Etat de toutes les sphères possibles au profit du bon vouloir des marchés financiers, réduction des salaires, rallongement des heures de travail, intensification des cadences de travail, dérégulation du marché du travail et démantèlement des droits des travailleurs au profit du «libre contrat» et de la «flexibilité»,…


§ 18   Mais, naturellement, l’histoire n’allait pas s’arrêter là. Le mythe absurde de la «fin de l’histoire» n’était pas destiné à durer longtemps. Le capitalisme n’avait pas tardé à être rattrapé par ses contradictions, et son triomphe néolibéral d’un jour n’a fait qu’amplifier celles-ci. A l’aube du troisième millénaire déjà, alors que les fracas causés par la chute du Mur de Berlin s’étaient tus, même les idéologues les plus cyniques de la classe dominante ne pouvaient plus décemment défendre la vision du pamphlet de Fukuyama. Plus personne, même les plus zélés adorateurs du capitalisme, ne peut nier :
Ø  Que la mondialisation capitaliste n’a pas ouvert la voie à une croissance économique qui selon ses promoteurs devait finir par profiter à tous, mais a mené à un brutal accroissement des inégalités et à une misère de masse.


Ø    Que la Guerre froide n’a pas fait place à la paix, mais à des nouvelles guerres impérialistes et des affrontements tribaux et nationalistes qui provoquent des drames et des misères insupportables.


Ø  Que ce n’est pas la justice et la coexistence pacifique qui ont remplacé la Guerre froide, mais le désordre et une crise économique sans précédent.


Ø  Que le monde ne s’ouvre pas sur une nouvelle étape de progrès et d’espoir, mais à la fin des espérances et que l’on assiste à un retour au passé, qui resurgit avec ses vieux démons : le racisme, la haine, le fanatisme, l’obscurantisme et l’intégrisme.
Ø  Que l’on assiste à la naissance d’une nouvelle forme de fascisme qui se nourrit du vide laissé par les espoirs perdus !


§ 19   Les nouvelles et brutales contradictions du capitalisme mondialisé n’avaient pas manqué de faire naître et se développer des nouveaux mouvements de résistance et de lutte pour une société plus juste dès la fin des années nonante. Les théories néolibérales furent soumises à une nécessaire critique théorique. Le mouvement altermondialiste émergea comme réponse à la dictature des multinationales, de l’OMC, du FMI et de la Banque mondiale et comme expression de l’exigence d’une autre société. Bien que ce mouvement déclinât rapidement du fait de sa faiblesse organisationnelle et de son insuffisance théorique, il apporta une critique nouvelle et salutaire du capitalisme mondialisé et contribua grandement au discrédit du dogme néolibéral et à l’émergence d’un mouvement populaire renouvelé de lutte. Le slogan «un autre monde est possible» a marqué la génération née au lendemain de la Guerre froide. En Amérique latine, plusieurs pays ont élu des gouvernements anti-impérialistes et socialistes, et toutes les tentatives de déstabilisation tentées par l’Empire étatsunien décadent n’ont pu les renverser. Les peuples du Venezuela, de Bolivie et d’Equateur ont pu entamer une phase nouvelle de leur lutte contre la domination néocoloniale étatsunienne, pour le progrès social et le socialisme. La construction de l’ALBA a permis de mettre fin à l’isolement de dernier îlot rouge dans une mer capitaliste où s’était retrouvée la République de Cuba, de briser définitivement l’hégémonie des USA en Amérique latine et de mettre en place un modèle économique fondé sur la coopération et la régulation par l’Etat en faveur du progrès social plutôt que sur la concurrence libre et non-faussée. Le Venezuela, la Bolivie et l’Equateur ont globalement réalisé ce que les partis communistes ont définis dans les années cinquante comme une démocratie avancée, domination des forces politiques progressistes, antimonopolistes et anti-impérialistes représentant les classes populaires  dans le cadre d’une démocratie bourgeoise; mesures prises par l’Etat pour l’élévation du niveau de vie des classes populaires, pour limiter la puissance des monopoles et nationalisations ; mais subsistance des rapports de production capitalistes et de l’exploitation de l’homme par l’homme, et donc subsistance et durcissement de la lutte des classes. Mais cette démocratie avancée ne saurait qu’être une phase de transition vers le socialisme, sous peine de reprise en main rapide par la réaction.
§ 20   Durant les années deux-mille, la crise systémique du capitalisme est allée s’aggravant, jusqu’à se déclarer dans la brutale crise financière de 2008, prélude à l’actuelle crise budgétaire de nombre d’Etats de l’Union Européenne et des USA, et début d’une crise globale d’une ampleur dépassant celle de 1929. La crise actuelle n’est que la conséquence nécessaire des lois intrinsèques du mode de production capitaliste. Pendant les quelques vingt dernières années, les fruits de l’augmentation de la productivité sont allés majoritairement au capital, au détriment des revenus  des travailleurs qui ont vu leur pouvoir d’achat diminuer. Pendant longtemps, pour relancer la consommation nécessaire à une économie de marché, l'accès au crédit a été de plus en plus facilité, d'abord au niveau des biens de consommation courants, puis finalement dans le domaine de l'immobilier. Cette fuite en avant du capitalisme pour préserver ses profits à court terme a accru encore la mainmise du capital financier sur l’ensemble de l’économie, et a donné aux banques un pouvoir jamais vu jusqu’alors, pouvoir qu’elles ont utilisé pour mener rapidement l’économie mondiale à la crise.
§ 21   La politique d’accès facilité au crédit menée par les banques a mené à une croissance artificielle d’une économie financière grâce à un endettement massif des ménages et ne pouvait que déboucher sur la plus grande bulle spéculative de l’histoire, entraînant la dévaluation brutale des actifs toxiques issus du surendettement des ménages, et menant les banques au bord de la faillite. Les Etats capitalistes se sont alors empressés de secourir les banquiers en difficulté, leurs versant immédiatement et sans aucune contrepartie des sommes faramineuses : 1'400 milliards d’euros, 700 milliards de dollars et 60 milliards de francs suisses ! Pour comparaison, seulement 82 milliards de dollars auraient suffi pour arrêter la faim dans le monde, mais les dirigeants bourgeois n’ont jamais eu la volonté politique de trouver cette modeste somme. Ce sauvetage des banques a de plus été décidé sans aucune consultation démocratique ; le Conseil fédéral et la BNS ont décidé de sauver l’UBS sans même consulter le parlement ! Les bourgeois ont essayé de faire passer ces cadeaux aux banquiers comme des nécessaires «plans de sauvetage de l’économie» auxquels les citoyens devraient consentir de bon cœur car nous serions tous «dans le même bateau». Mais il est pourtant évident que les décideurs bourgeois n’ont sauvé que les profits des banquiers, auxquels aucune contrepartie n’a été demandée pour les fabuleux cadeaux payés avec l’argent public. Le système financier spéculatif qui a précipité l’économie mondiale dans la crise a en particulier été laissé intact ; les plans de sauvetage n’ont donc fait que relancer la spéculation, et la dynamique de crise à laquelle elle conduit nécessairement. Ces prétendus plans de sauvetage n’ont en rien permis d’éviter la crise, qui n’a fait que s’aggraver. Et c’est aux peuples que le capital veut faire payer la facture !
§ 22   Suite à l’effondrement de la bulle spéculative de l’immobilier américain et au plans de sauvetage des banques, plusieurs Etats d’Europe et d’Amérique du Nord se sont retrouvés confrontés à une crise budgétaire qui menace de les mettre en faillite. Pendant des années, les Etats bourgeois ont massivement baissé leurs recettes fiscales pour accroitre encore la richesse des plus riches et les profits des actionnaires. Pour compenser les déficits budgétaires ainsi créés, ils ont emprunté, non pas à leurs propres banques nationales à taux nul, mais à des banques privées à des taux d’usuriers, car, l’Etat devant être par définition un débiteur solvable, les dettes souveraines donnaient des produits financier sûrs aux banques, et le payement des intérêts de la dette une confortable source de revenus. Ce mode de fonctionner a mené les Etats en questions à une crise budgétaire violente lorsque suite à la récession et au coût du sauvetage des banques ils se sont retrouvés dans l’incapacité de payer les intérêts de leurs dettes et de s’endetter d’avantage. Ces Etats étant aux mains de la bourgeoisie, que le gouvernement du moment soit ouvertement de droite ou social-démocrate, ils ne pouvaient envisager de refuser de payer leurs dettes et de nationaliser leurs banques sans contrepartie afin d’assurer la pérennité de leur économie dans l’intérêt de leur peuple, leur seul but étant de sauver les banques qui se retrouveraient en faillite si leurs dettes souveraines ne valaient plus rien suite à la faillite des Etats. Ces Etats ont donc décidé de faire payer la facture aux peuples, en appliquant des plans de rigueur, soit en coupant massivement dans les prestations sociales déjà fort modestes, en baissant massivement les salaires et en augmentant la durée hebdomadaire du travail, pour le plus grand bien des profits du capital ; mais au prix de l’aggravation de la crise, rendue inévitable par la baisse du pouvoir d’achat de la population consécutive aux plans de rigueur. Aux Etats-Unis, Démocrates et Républicains se sont mis d’accord pour autoriser l’Etat à s’endetter d’avantage (les USA sont pourtant déjà de loin l’Etat le plus endette du monde), au prix d’un plan de rigueur brutal qui réduit à néant les maigres restes des rares acquis sociaux du peuple étatsunien et d’une fuite en avant dans de nouvelles guerres impérialistes pour le contrôle des ressources naturelles, comme la récente guerre contre la Lybie, pour sauver leur Empire en pleine décadence. Le gouvernement conservateur-libéral-démocrate du Royaume-Uni applique actuellement un programme de coupes dans les prestations sociales d’une ampleur encore inégalée dans l’histoire. La Grèce et le Portugal se sont retrouvés au bord de la faillite. Pour sauver les créanciers de ces pays, principalement les banques françaises et allemandes, des pertes importantes qu’occasionnerait la faillite de ces pays et pour éviter à l’euro l’effondrement alors inévitable qui mettrait en danger l’Union européenne en tant que telle, la Commission européenne, les gouvernements d’Allemagne et de France, la Banque mondiale et le FMI se sont mis d’accord sur des «plans d’aide» à ces pays…qui en fait n’aident que leurs créanciers. Ces plans consistent en des prêts, consentis principalement par les banques allemandes et françaises, à des taux d’usurier et en contrepartie de la vente à prix bradés des entreprises publiques de ces pays à ces mêmes banques et des plans d’austérité d’une brutalité inouïe pour leurs peuples. Pour faire payer la crise aux peuples dans toute l’Union Européenne et sauver l’Euro au détriment des intérêts légitimes des travailleurs, le Parlement Européen a imposé le « Pacte pour l’Euro» soit l’interdiction des déficits publics et pour y parvenir toute une série de mesures fondées sur des coupes sombres dans les prestations sociales, la levée des entraves à la concurrence libre et non-faussée, dérégulation du marché du travail pour promouvoir la flexibilité, déréglementation des marchés…en un mot retour au capitalisme de la jungle. Mais plusieurs autres pays d’Unions Européenne, comme l’Italie et l’Espagne, beaucoup plus importants que la Grèce ou le Portugal, sont aussi menacés de faillite, qui conduirait à un effondrement de l’Euro et à l’implosion de l’Union européenne.
§ 23   Nous ne sommes qu’au début d’une crise systémique profonde et de longue durée, certainement plus ample encore que celle de 1929, avec tous les drames humains, les bouleversements géopolitiques, et une radicalisation des antagonismes de classes que cela implique. Cette situation est à la fois pleine de menaces et de promesses. Menaces de guerre tout d’abord. La récession de l’économie mondiale, la rarification des ressources naturelles, la lutte pour leur contrôle et pour le contrôle des marchés mènent à l’accroissement des tensions inter-impérialistes qui risquent de déboucher sur un nouveau conflit mondial. Les vieux empires des USA et d’Union Européenne sont en pleine décadence et en plein marasme économique. Ils doivent faire face à la montée des puissances émergentes que sont la République populaire de Chine, à l’abri de la crise jusque là grâce à une régulation efficace de l’économie par l’Etat et qui, désormais deuxième économie mondiale, menace les intérêts commerciaux des pays occidentaux dans leurs anciennes colonies, le Brésil, puissance impérialiste naissante qui concurrence efficacement les Etats-Unis en Amérique latine, et tant d’autres puissances locales qui souhaitent briser la domination mondiale des USA. Face à cette situation, les Etats-Unis et l’OTAN pourraient être amenés à radicaliser leur politique de guerres impérialistes et multiplier les aventures néocoloniales, avec toute la menace que cela implique. Menace de fascisme aussi. Face à la contestation populaire grandissante de politiques qui ne laissent plus d’autres choix aux travailleurs et pour imposer de nouvelles guerres de plus en plus impopulaires, les bourgeoisies d’Europe et d’Amérique du Nord pourraient être tentées de passer à des formes de gouvernement ouvertement fascistes et dictatoriales ; menace qui est plus que réelle aujourd’hui, avec la dérive anti-démocratique et policière de l’Union européenne et des USA, et avec la montée d’une extrême-droite puissante et de plus en plus proche dufascisme.
§ 24   Malgré la gravité de la situation actuelle et les difficultés rencontrées par la classe des travailleurs, on peut aussi repérer de nombreux éléments encourageants. Actuellement l’idéologie néolibérale est totalement discréditée depuis la crise de 2008. Des couches de plus en plus larges du peuple prennent conscience des contradictions réelles et de l’absurdité du système capitaliste. La nocivité de l’activité des banques et de la finance spéculative relève aujourd’hui du domaine de l’évidence. Une majorité de la population commence à se rendre compte que le capitalisme est une impasse et qu’un autre système est nécessaire. Une nouvelle conscience de lutte des classes apparaît et l’intérêt s’accroît pour la pensée de Marx. Les peuples se lèvent pour protester contre les politiques d’austérité et la domination de l’oligarchie capitaliste.
§ 25   La Grèce et le Portugal sont secoués par des grèves massives et des manifestations de grande ampleur organisées par les partis communistes et les syndicats de classes. La plupart des pays d’Union Européenne et les Etats-Unis même connaissent des luttes similaires. La propagande anticommuniste est contredite jusque dans ses fondements par des auteurs communistes, voire même par des auteurs bourgeois mais critiques, et son influence sur les masses commence à s’effriter. Une majorité des habitants des anciens pays socialistes se rendent compte désormais des mérites réels des sociétés socialistes qu’ils ont perdus, en dépit des défauts réels ayant affecté ces sociétés. En Russie, le Parti communiste se renforce de plus en plus, redevenant désormais une force réelle capable de prendre le pouvoir à moyen terme et posant ouvertement à l’ordre du jour le rétablissement du pouvoir soviétique. Le mouvement des Indignés, bien qu’il eût été éphémère et notoirement insuffisant du fait de son refus de l’organisation et de son incohérence théorique, a tout de même eu le mérite d’avoir été une étape indispensable vers la prise de conscience par les peuples que la démocratie bourgeoise n’est que la façade derrière se cache le pouvoir réel de l’oligarchie, que le capitalisme est une impasse pour l’humanité et qu’une autre société est à la fois possible et nécessaire.
§ 26   Aujourd’hui, alors que l’on observe un affrontement à outrance entre les forces de la réaction au service du grand capital et les peuples aspirant au progrès et à la justice, l’heure est à la reconstruction d’un mouvement communiste international fort, organisé, idéologiquement cohérant, qui apporte aux peuples une alternatives politiques à laquelle ceux-ci aspirent et prêt à se battre pour le renversement du pouvoir bourgeois et la construction d’une société socialiste.



III La Suisse d’aujourd’hui

§ 27   La Suisse a été globalement épargnée par la crise et s’en sort même plutôt bien, si l’on regarde les données macro-économiques.  Mais, d’une part, la Suisse n’est pas épargnée, et de loin, par les inégalités et les problèmes sociaux que connaissent les autres pays du continent, et, d’autre part, l’économie suisse est extrêmement dépendante de ses échanges avec le reste du monde, avec l’Union européenne surtout. En effet la richesse de la Suisse est pour une bonne part fondée sur l'exploitation d'autres régions du globe. Ce trait est particulièrement visible lorsque nos Conseillers fédéraux s'en vont aux quatre coins de la planète, accompagnés des représentants du grand patronat, pour conclure des contrats juteux de libre-échange et d'établissement, pour le plus grand bonheur du capital helvétique. Les structures politiques de la Suisse actuelle ont été construites et utilisées pour dynamiser et préserver cet état de fait.
§ 28   Extrêmement dépendante de l’économie mondiale, la Suisse ne saurait rester protégée d’une crise majeure de la zone Euro. L’économie essentiellement tertiarisée de la Suisse n’est susceptible d’aucun repli sur le marché intérieur. Ce modèle économique est extrêmement fragile et volera inévitablement en éclats avec l’approfondissement de la crise de la zone Euro. Il doit d’urgence être modifié pour la survie même du pays.


Le rôle de la Suisse dans l'économie mondiale


§ 29   A la fin de la IIème Guerre mondiale, notre pays s'est trouvé dans la situation privilégiée d'un pays au potentiel industriel intact et a eu la possibilité d'employer une main-d'œuvre étrangère nombreuse, privée de droits et employée à bas salaires. Cette situation amena des avantages concurrentiels massifs aux capitalistes suisses, situation encore favorisée par la complicité des syndicats placés sous le régime de la "paix du travail" et du Parti socialiste suisse, appâté par la participation au pouvoir gouvernemental. Le développement économique qui en a résulté a amélioré les conditions de vie d'une partie de la population. Toutefois, la dépolitisation d'une part importante des citoyens et un syndicalisme uniquement tourné vers la négociation n'ont fait que renforcer l'exploitation de la grande majorité des salariés.
§ 30   L'économie suisse est marquée par un nombre relativement élevé, en apparence, de PME. Les grandes entreprises sont rares, mais de fait contrôlent la majeure partie de l’économie, et une grande part des PME et de faux indépendants ne sont que des sous-traitants à leur service. C'est bel et bien une petite mais puissante élite qui investit les conseils d'administration des banques ou des grandes entreprises industrielles, et c'est encore elle qui décide de la solution aux questions fondamentales de l'économie. La majorité des politiciens de droite au niveau national sont eux-mêmes des représentants du patronat helvétique et les décisions qu’ils prennent au niveau politique, loin de favoriser le bien-être de la majorité du peuple, ne visent qu’à soutenir et privilégier leurs intérêts de classe.
§ 31   Les grandes entreprises capitalistes suisses ont étendu leurs activités à tous les continents. Plusieurs d'entre elles ont une dimension mondiale, comme dans le cas de l'agro-alimentaire, des pharmas, du luxe et des cosmétiques. Elles participent activement à l'exploitation des pays du Sud, à la corruption de leurs gouvernements et, partant, à l'appauvrissement progressif des populations concernées. Elles déplacent dans des pays aux contrôles laxistes les branches de production créatrices de nuisances écologiques massives et mettent à contribution une forte main-d'œuvre faiblement salariée. Le capital financier, produit de la combinaison du capital industriel et du capital bancaire, est devenu une pieuvre géante dirigeant le développement capitaliste suisse.
§ 32   De plus, la concurrence entre entreprises a conduit à une concentration du capital absolument gigantesque. Ainsi, en termes de capitalisation boursière totale, la Suisse occupe le 5ème rang mondial et la valeur des entreprises suisses, dans le top 100 mondial, dépasse 500 milliards de dollars, avec une plus-value de 100 milliards réalisée rien qu'entre 2008 et 2010.
§ 33   Les banques suisses, quant à elles, ont servi de refuge aux capitaux des nombreux pays occidentaux afin d'être soustraits à la fiscalité. Cette "hospitalité" a été étendue de façon toujours plus indécente aux dictateurs et aux élites du Sud, qui voulaient mettre en sûreté ce qu'ils avaient extorqué à leurs peuples spoliés et asservis avec la complicité de pays occidentaux. Les représentants du capital financier ne règnent pas seulement sur l'économie; ils ont aussi conquis le pouvoir politique. Le processus politique est déterminé et marqué par les décisions d'ordre économique, prises dans les centres de l'économie et de la haute finance.


Les inégalités sociales en Suisse
 
§ 34   La Suisse possède une structure sociale fortement inégalitaire, malgré les apparences que la propagande officielle essaie de créer. Alors que 6 contribuables sur 10 possèdent une fortune moyenne de 7000 francs, 0,3% des riches déclarent une fortune moyenne de 14 millions. Si la richesse de la société est très inégalement répartie, les conditions de vie des travailleurs suisses ont changé, dès la fin de la IIème Guerre mondiale, avec l'augmentation relative des revenus liée aux développements du capitalisme en Suisse et l'apparition de ce qui est communément appelé "les classes moyennes". En effet, à côté d'une classe supérieure relativement peu importante mais extrêmement riche, il y a en Suisse des milieux sociaux vivant dans des conditions matérielles garanties et disposant en partie aussi de réserves financières. Cette classe moyenne, qui comprend surtout des personnes nanties d'un emploi  sûr et exercé à plein temps et de leurs proches, peut néanmoins connaître des difficultés matérielles et financières dès qu'un événement fâcheux survient, tels l'invalidité due à un accident ou à la maladie, la séparation et le divorce ou encore le chômage. A côté de cela, il y a aussi un nombre croissant de ménages vivant au-dessous du minimum vital, ou tout juste au-dessus. Ainsi 40% des salariés disposent d'un salaire mensuel net de 4000 francs ou moins. Cette situation concerne presque 7 femmes salariées sur 10. 400'000 salariés gagnent moins de 22,- de l’heure, soit moins du minimum vital en équivalent plein temps Bref, la pyramide de fortune et de pouvoir social est bien présente dans notre pays.
§ 35   Un trait typique de la société suisse depuis plusieurs décennies est le recours constant à l'immigration pour répondre aux besoins incessants du capital en main-d'œuvre bon marché et hautement qualifiée. Cette exigence détermine profondément les politiques à l'égard des étrangers et des requérants d'asile ainsi que le recours aux mesures de police ou à des moyens administratifs et répressifs pour les encadrer. Inhumaines, ces politiques nient également la part de responsabilité incombant à la Suisse dans la misère économique d'autres pays. La présence de travailleurs étrangers clandestins permet, quant à elle, une exploitation accrue de cette force de travail peu coûteuse et peu revendicatrice, ainsi qu’une confirmation des tendances de déni de l'être humain dans le mode de production capitaliste.


La situation à Genève

§ 36   Petite ville, Genève est pourtant une métropole d’importance mondiale, concentrant un nombre inégalé d’organisations internationales, de sièges de multinationales et de transactions financières et commerciales au m2. Ainsi : près de la moitié des transactions pétrolières et énormément de transactions boursières sur les matières premières sont conclues à Genève, alors que ces transactions affament le monde. Cette situation implique une économie essentiellement tertiarisée, dominée par les banques, les sièges des multinationales, les fiduciaires ; avec un important réservoir de cadres supérieurs et moyens ayant des salaires élevés et, partant, attachés au système capitaliste et à l’idéologie libérale. Le PS, les Verts et, dans une moindre mesure, Solidarités se disputent la même base sociale que sont les classes moyennes, et plus spécifiquement les fonctionnaires.
§ 37   Les usines, qui naguère fournissaient la base sociale du Parti du Travail, ont en revanche été délocalisées à Zürich où le PdA était faible. Les zones industrielles contiennent désormais surtout des sièges d’entreprises, des entrepôts et des artisans. Genève n’a pratiquement plus de secteur secondaire. Elle n’en compte pas moins une importante population de salariés précarisés, employés principalement dans la vente et les services, le plus haut taux de chômage de Suisse et une forte part de sa population est marginalisée, réduite à l’aide sociale. Il est à noter aussi que près de la moitié de la population genevoise et une majorité des classes populaires est composée d’étrangers, dépourvus de droits politiques, ou alors au niveau communal seulement.
§ 38   Aucun parti, à part le Parti du Travail, ainsi que le parti les communistes depuis sa fondation, ne défend réellement cette majorité de la population. Notre Parti a là amplement de quoi recouvrer une base sociale importante et à terme devenir le premier parti de la République qu’il doit être.
§ 39   Cette situation de présence simultanée de l’extrême richesse, d’une classe supérieure particulièrement nombreuse, et de problèmes sociaux dus à une forte pauvreté, crée des problèmes de développement propres à Genève. Depuis des années, la stratégie de développement économique du Conseil d’Etat consiste à faire venir des multinationales étrangères actives dans le domaine de la finance, et cela à coup de subventions fiscales. Ce modèle de développement est extrêmement myope et contre-productif. En effet, les recettes fiscales supplémentaires que ces multinationales sont censées générer ne profitent pas aux classes populaires, car elles sont annulées par les baisses d’impôts concoctées par la droite, qui par la même occasion réduit les prestations sociales. Ces multinationales ne créent pas plus d’emploi à Genève, car elles ont besoin d’une main d’œuvre extrêmement spécifiques qu’elles ne trouvent pas sur place ; au lieu de cela, elles amènent leurs cadres auxquels elles subventionnent des logements, contribuant à augmenter les prix des logements, jusqu’à rendre le centre-ville à peu près inaccessible pour les classes populaires, aggravant d’autant la crise du logement, saturant les infrastructures et produisant de l’inflation.
§ 40   Actuellement, la volonté jamais proclamée, mais effective, de la droite, est de faire de Genève un véritable Monaco sur Léman, un îlot de cherté et de luxe réservé aux classes supérieures, aux riches expatriés, aux banques et aux multinationales financières, entouré d’une zone villa luxueuse et d’une banlieue ghettoïsé. Le Parti du Travail s’oppose radicalement à ce modèle de développement, qui est absolument contraire aux intérêts des classes populaires et absolument non-viable à moyen terme, car il est impossible de fonder un quelconque développement économique plus ou moins durable sur la finance, qui produit essentiellement des bulles spéculatives.


Les partis politiques suisses
 
§ 41   Le PLR et le PDC forment ce que l’on appelle la droite classique, ou le centre-droit, ou l’Entente à Genève. Au-delà de leurs différences, qui furent historiquement profondes, mais qui aujourd’hui se sont pour l’essentiel estompées, mis à part le fait que le PDC est un peu plus à gauche que le PLR, ces deux partis ont en commun d’être la représentation politique directe de la grande bourgeoisie monopoliste, ce qui est particulièrement flagrant dans le cas du PLR. Financés directement et très généreusement par le grand capital, ces partis défendent une politique « libérale » qui correspond aux intérêts des possédants : libéralisation économique, démantèlement de tous les acquis sociaux, renflouement des banques à coups de milliards, et de plus en plus politique ultra-sécuritaire répressive afin de mater par la force une prévisible résistance populaire.
§ 42   L’UDC et le MCG forment l’extrême-droite, bien qu’elles le dénient. Concurrents, ces deux partis n’en sont pas moins très similaires sur le fond, même si le MCG est politiquement moins cohérent et plus diversifié que l’UDC. Au niveau national, l’UDC reçoit le même financement direct des grandes entreprises que les partis du centre-droit car elle conduit strictement la même politique réactionnaire et antipopulaire, qu’elle double toutefois d’un discours démagogique « populiste ». Faisant mine de défendre les intérêts du peuple suisse, elle propage en fait un discours xénophobe, dans le but de diviser les travailleurs entre suisses et étrangers afin d’empêcher l’unité de la classe ouvrière dans l’intérêt de la domination bourgeoise. L’UDC double ce discours d’une démagogie ultra-sécuritaire et d’une stigmatisation des musulmans désignés comme boucs-émissaires, réunissant là toutes les caractéristiques d’un parti fascisant, prêt à établir un régime néo-fasciste le jour où la bourgeoisie suisse se sentira menacée dans son pouvoir.  A Genève, le MCG vote dans la plupart des cas avec la droite. Seul parti de masse genevois à ce jour, il regroupe une base essentiellement dépolitisée, mais disciplinée, dirigée par des personnalités politiques de droite qui séduisent une partie des classes populaires avec globalement le même discours «populiste» et xénophobe que l’UDC, ciblant plus particulièrement les frontaliers, et diffusant des idées néo-fascistes, parfois ouvertement.
§ 43   De l’autre côté de l’hémicycle siègent les partis de la "gauche gouvernementale", le PS et les Verts, qui prétendent incarner une alternative politique à la droite, mais qui, bien qu’ils s’en distinguent sur un nombre important de points et sont pour l’essentiel des forces progressistes, n’incarnent de fait qu’une alternative illusoire. Fondé historiquement comme parti de la classe ouvrière et de la révolution, le PS reste aujourd’hui un parti de gauche, qui n’a pas renoncé aux lois du marché capitaliste, avec à Genève une ligne progressiste assez marquée, même s’il n’est plus ni un parti des travailleurs ni un parti pour le socialisme. Plusieurs décennies de collaboration de classe et de compromission et cinquante ans de participation ininterrompue à un gouvernement bourgeois, ont fait perdre au PS toute volonté révolutionnaire et même transformatrice de la société et ont distordu au possible le lien à la classe ouvrière qu’il conserve à travers les syndicats. Aujourd’hui, le PS est un parti réformiste, et s’il affirme dans son programme vouloir dépasser le capitalisme et construire une société socialiste, ce programme reste ambigu au possible et ne définit pas les moyens concrets de parvenir à cet objectif qui reste de ce fait illusoire. Quant à sa composition de classe, le PS est aujourd’hui essentiellement un parti des classes moyennes dont l’aspiration principale se limite à maintenir leur niveau de vie pour ne pas tomber dans la prolétarisation. Le PS reste malgré tout un parti progressiste qui compte dans ses rangs des membres nettement plus à gauche que ne l’est sa ligne générale et continue pour l’essentiel à défendre les acquis sociaux existants, avec toutefois une combativité limitée lorsqu’il s’agit de lutter pour les élargir.
§ 44   Malgré un écologisme de façade, qui se réduit en absence de toute opposition réelle au capitalisme à son aspect le plus minimal, les Verts sont dans leur très large majorité acquis à la société capitaliste, quand ce n’est pas à l’idéologie néolibérale et méritocratique. Parti des classes moyennes, les Verts sont divisés entre une aile gauche social-démocratisante, qui lutte encore pour défendre les acquis sociaux, et une aile droite, qui est purement et simplement de droite, accepte quant au fond l’idéologie néolibérale et défend la liquidation des acquis sociaux avec les mêmes arguments que la droite. A Genève, les Verts votent tantôt à gauche, tantôt à droite, selon quelle est l’aile qui arrive à prendre la majorité, mais dans la plupart des cas à gauche. Il faut noter que les Jeunes Verts se distinguent par une ligne nettement différente de celle des Verts dans la mesure où ils remettent en cause la croissance capitaliste, qui menace à long terme la survie de l’humanité, et proposent de sortir du capitalisme au nom de l’idéologie de la décroissance, bien que leur projet de société alternative au capitalisme soit loin d’être clair.
§ 45   La classe ouvrière suisse est politiquement peu organisée. Les syndicats qui la défendent sont la plupart du temps pris en main par des dirigeants issus du PS qui souvent émoussent l’action syndicale en l’enfermant dans la logique de "paix du travail" qui n’est qu’un autre nom pour la collaboration de classe. Il existe toutefois aussi des syndicats plus combatifs, qui mènent une vraie politique de lutte, de façon de plus en plus conséquente à Genève. Par ailleurs, la base syndicale, composée de travailleurs, arrive souvent à imposer une ligne de lutte, plus que ne le voudrait la direction. Quoi qu’il en soit, les syndicats demeurent des forces essentielles d’organisation et de lutte des travailleurs, et il est du devoir des militants du Parti du Travail de s’y impliquer pour renforcer une ligne de lutte de classe.
§ 46   À la gauche du PS il existe toute une pluralité d’organisations, dont le poids d’ensemble reste minime. La plus notable de ces organisations est solidaritéS, qui pour l’essentiel est un mouvement de classes moyennes, de fonctionnaires principalement, ce qui lui donne un électorat sûr mais insuffisant pour atteindre le quorum. L’idéologie de SolidaritéS est d’inspiration trotskiste ou gauchiste, mais, dans ses écrits, SolidaritéS se proclame partisan d’une société socialiste. Les méthodes politiques de solidaritéS cependant, consistant en la récupération politique de tout ce qui peut l’être, souvent sans analyse de fond et au prix de positions politiques incohérentes et erronées, et tendance à se renforcer systématiquement au détriment de ses partenaires et de marginaliser ceux-ci, conduisent régulièrement à des ruptures d’alliance et rendent plus que problématique la collaboration avec cette organisation.
§ 47   A noter, depuis sa création, l’exception du parti les communistes qui, quoique minoritaire, est le seul de par ses idées marxistes-léninistes à se rapprocher idéologiquement et par ses actions du Parti du Travail.
§ 48   A Genève existent également des rassemblements de militants de gauche, n’ayant ni l’organisation nécessaire pour être un parti ni de ligne politique claire, mais qui sont des partenaires politiques indispensables pour le Parti du Travail : les Indépendants et le DAL. Il faut également signaler l’existence de groupuscules gauchistes, d’inspiration trotskiste ou anarchiste, qui refusent la participation parlementaire, avec lesquels le Parti du Travail peut à l’occasion travailler dans le cadre de comités unitaires, mais dont l’anticommunisme et la quasi-inexistence restreignent les possibilités de collaboration. Des efforts pour fédérer les diverses composantes de la Gauche suisse sont périodiquement tentées, avec un succès tout relatif. Par ailleurs, ces tentatives sont souvent caractérisées par un certain vide idéologique ou par des impasses politiques, la dernière de ces tentatives étant la Gauche. Ni les partis de la gauche gouvernementale, ni SolidaritéS, ni une Gauche aux contours flous, ni les divers groupuscules gauchistes ne peuvent représenter les travailleurs de ce pays. Les travailleurs ont besoin d’un parti qui se réclame de la lutte des classes et de la classe ouvrière, qui ne soit pas entachée par la collaboration de classe avec la bourgeoisie et qui soit prêt à lutter jusqu’au bout pour l’abolition du capitalisme et la construction d’une société communiste. Un tel parti existe et c’est le Parti du Travail.


IV : Notre programme pour le bien-être du peuple
Politique économique
§ 49   La politique économique de la majorité de droite au pouvoir aujourd’hui consiste exclusivement dans la défense des intérêts d’une petite oligarchie et de la maximisation des profits des banques et des multinationales, quelles qu’en soient les conséquences pour les classes populaires et le pays. L’Etat bourgeois n’intervient que pour soutenir les banques et multinationales suisses et leur soif de profit, pour leur obtenir des contrats internationaux et des traités de libre-échange, ou pour sauver l’UBS en faillite à coup de milliards. Pour le reste, il laisse faire le marché. Depuis les années 1980, la dérégulation des marchés de capitaux et des marchés financiers a permis une liberté totale au capital de s'investir et de se désinvestir là où les taux de profit étaient les plus fabuleux pour lui. Cette politique est absolument contraire aux intérêts du peuple suisse et nuisible pour le pays. Elle a abouti à la concentration du capital entre les mains de quelques multinationales et grandes banques, à la désindustrialisation du pays, à la réduction du nombre des exploitations agricoles et à la mise en danger de l’agriculture nationale, à la domination démesurée de l’économie suisse par la finance et à la prédominance du secteur tertiaire.
§ 50 Or les capacités de nuisances du capital financier, notamment de ses fractions bancaires, ne sont plus à démontrer. Elles sont parties prenantes de la crise systémique en cours. Le modèle actuel de développement, fondé sur la prédominance du secteur financier, autant dire sur le monopoly et les bulles spéculatives, est extrêmement dangereux et peu durable. En outre, il est socialement illogique et inacceptable de laisser l’économie entre les mains de quelques multinationales privées qui possèdent aujourd’hui un pouvoir démesuré, qu’elles utilisent uniquement pour accroître les profits de leurs actionnaires, sans égards au bien commun et au détriment des intérêts de l’ensemble de la société. Objectivement, ces multinationales exercent un pouvoir social et planifient la production. Il n’y a aucune raison que ce pouvoir social si important reste en mains privés. Il doit être assumé par la collectivité.
§ 51   Le Parti du Travail souhaite mettre l’économie au service du peuple. Cet objectif est inatteignable dans un cadre capitaliste. Il est nécessaire de briser le pouvoir du capital pour édifier un autre système économique, qui réponde aux aspirations de l’ensemble de la société. Faire payer le capital ! Voilà notre mot d'ordre. Nous réclamons l'interdiction de prise de participation par le capital étranger dans les entreprises helvétiques, l'imposition drastique sur le bénéfice des entreprises, la socialisation du crédit et la suppression des parachutes dorés, de même que celle des stock-options. Nous nous battons pour la socialisation de l’intégralité des banques et des compagnies d’assurance, sans indemnisation et pour la constitution, sur cette base, d’un fonds social d’investissement au bénéfice des services publics, des équipements collectifs, du secteur de l’économie sociale, des entreprises autogérées, de la réindustrialisation du pays et de la défense de l’agriculture nationale. Pour parvenir à ce but et bâtir une économie nationale durable et au service du peuple, il sera nécessaire de rompre avec le dogme du libre-échange et mettre en place des mesures protectionnistes afin dé défendre l’industrie et l’agriculture nationales. Sur le plan des entreprises, nous réclamons la socialisation sur fonds publics de toute entreprise se déclarant en faillite de manière à la transformer en entreprise autogérée et l'interdiction du recours aux formes de travail précaires (contrats à durée déterminée, intérim, saisonniers, etc.). Ces mesures seront prises sous le contrôle de conseils d’établissement élus par les travailleurs et placés sous leur surveillance et leur direction.
§ 52   Le Parti du Travail propose :
Ø  Une limitation de l’implantation des multinationales financières étrangères et une réduction du poids du secteur financier dans l’économie suisse

Ø  La réindustrialisation de la Suisse avec le soutien de l’Etat

Ø  La relocalisation des activités productives

Ø  La nationalisation sans indemnité des entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs ou qui souhaitent délocaliser
Ø  Des mesures protectionnistes pour défendre l’industrie et l’agriculture nationale

Ø  La taxation de transactions financières

Ø  La séparation entre les banques d’investissement et les banques d’épargne
Ø  La nationalisation sans indemnité des banques et des compagnies d’assurance
Ø  Atteindre dans la mesure du possible une autosuffisance alimentaire grâce à une agriculture biologique soutenue par des mesures protectionnistes



Droits des travailleurs
 
§ 53   Actuellement la démocratie s’arrête aux portes de l’entreprise. Dans les entreprises, le patronat fait la loi, et il la fait dans le seul but de maximiser ses profits et au détriment des travailleurs. Pour accroître encore les dividendes des actionnaires, les entreprises baissent de plus en plus les salaires, jusqu’au point où 400'000 salariés gagnent moins du minimum vital pour un équivalent plein temps. De plus, les entreprises profitent des accords bilatéraux avec l’Union européenne pour faire du dumping salarial, essayent d’augmenter les heures de travail sans hausses de salaires et rechignent à signer des CCT. L’Etat est objectivement du côté du patronat, le nombre d’inspecteurs chargés de contrôler le respect des lois par les entreprises et de lutter contre dumping salarial sont en nombre ridiculement insuffisant et les contrôles effectués sont très laxistes.
§ 54   Les syndicats sont insuffisamment efficaces pour défendre les travailleurs car ils sont encore trop souvent liés par l’idéologie de la paix du travail et ne veulent pas assumer une ligne de lutte des classes. Le Parti du Travail promeut une politique conséquente de défense des droits des travailleurs fondé sur la lutte de classe.
§ 55   Le Parti du Travail propose :
Ø  L’application de l’égalité entre les salaires des hommes et des femmes

Ø  L’instauration d’un salaire minimum de 4'000 francs par mois

Ø  L’obligation pour les entreprises de conclure des CCT avec des syndicats représentatifs.

Ø  La  garantie du droit à la présence syndicale sur le lieu de travail.

Ø  L’introduction de la semaine de 35 heures, sans réduction de salaire et avec engagement de personnel
Ø  La mise en place d’une protection contre les licenciements

Ø  L’application et le renforcement des mesures d’accompagnement de la libre circulation avec l’UE
Ø  La fin du dumping salarial

Ø  L’augmentation des contrôles pour lutter contre la sous-enchère salariale.
Ø  Le renforcement des syndicats combatifs et à l’écoute de la base
Ø  Le droit de grève complet
Ø  La rupture de la paix du travail pour une ligne syndicale de lutte de classe
Ø  Des mesures concrètes contre la flexibilisation à sens unique qui détériore les conditions de travail


Politique fiscale

§ 56   Depuis plus de deux décennies, la droite ne connaît qu’un crédo en matière de politique fiscale : baisser les impôts ! Puis les rebaisser encore ! Baisse d’impôts pour les personnes, et baisses d’impôts pour les entreprises ! Le tout sur la base de l’argument que si on ne baisse pas les impôts, les riches ou les entreprises vont partir dans le canton voisin, ou le pays voisin : la sacro-sainte concurrence fiscale. La conséquence de ces baisses d’impôts est évidemment de créer des déficits dans les budgets de l’Etat, auxquels on remédie par des coupes dans les prestations sociales et des baisses des dépenses qui sont pourtant absolument vitales pour la populations, puis on procède à des nouvelles baisses d’impôts, ensuite à des nouvelles baisses de prestations…et ainsi de suite.
§ 57   Outre les baisses d’impôt en tant que telles, la droite s’attaque aux impôts directs, qui sont progressifs, et souhaite les baisser linéairement ou en réduire la progressivité. L’impôt fédéral direct fait l’objet d’attaques particulièrement courantes. En contrepartie, la droite souhaite augmenter les impôts indirects, la TVA surtout, qui sont particulièrement injustes et antisociaux car ils frappent tout le monde au même taux, donc très durement les bas revenus mais de façon négligeable les plus riches. Un projet récurrent de la droite est d’instaurer un taux de TVA unique, et de supprimer donc la TVA réduite pour les produits de première nécessité, donc de frapper encore les classes populaires.
§ 58   Telle n’est pas la politique fiscale que souhaite mener le Parti du Travail. Il n’y a pour nous aucune raison valable de continuer de baisser les impôts ; au contraire il faut augmenter les impôts sur les hauts revenus et le capital, car non seulement une imposition fortement progressive est nécessaire pour assurer une redistribution, même limitée, des richesses à travers les prestations sociale, mais elle l’est aussi pour assurer les investissements socialement indispensables, comme l’école publique et gratuite, les infrastructures et logements publics, les services publics qui pour être de qualité ne peuvent parfois qu’être déficitaires…dépenses que les partis bourgeois ont tendance à négliger et à privatiser si possible, ce qui signifie délabrement, mauvaise qualité et inaccessibilité pour une large partie de la population.
 § 59  Le Parti du Travail propose :
Ø  D’augmenter fortement les impôts directs pour les hauts revenus afin de revenir sur les baisses d’impôts successives tout en accentuant la progressivité de la fiscalité.
Ø  De taxer fortement les profits spéculatifs, les dividendes et les holdings.

Ø  L’harmonisation des taux d’imposition entres les cantons
Ø  De taxer fortement les entreprises qui licencient tout en faisant des bénéfices.
Ø  De mettre en pratique le principe de la Taxe Tobin afin d’imposer fortement les capitaux purement spéculatifs.

Ø  De s’opposer à toute hausse de la TVA et d’autres taxes indirectes, il faut au contraire les remplacer par l’imposition directe.
Ø  D’abolir les forfaits fiscaux.
Ø  De supprimer le secret bancaire pour pouvoir poursuivre sévèrement la fraude et la soustraction fiscale qui font perdre de milliards aux pays pauvres, mais aussi à la Suisse car des riches contribuables helvétiques en abusent massivement aussi.
Ø  L’instauration d’un impôt fédéral sur les successions
Ø  Une véritable imposition des bénéfices des sociétés de capitaux et sur le capital des sociétés financières
Ø  Une importante augmentation de l’impôt sur les gains immobiliers



Politique sociale
AVS et LPP
 
§ 60   Le 2 décembre 1969, estimant les prestations de l’AVS insuffisantes, le Parti Suisse du Travail dépose une initiative « Pour une véritable retraite populaire », obligeant ainsi le Conseil fédéral et le Parlement à agir. Mais la puissante Union des compagnies suisses d’assurance sur la vie ne voit pas d’un bon œil la perspective de laisser s’échapper les juteuses parts de marché de la prévoyance par capitalisation. Sous sa pression, le Conseil fédéral finit par proposer le contre-projet, dit des « trois piliers ». Celui-ci sera accepté le 3 décembre 1972 par 74% des voix, alors que l’initiative du Parti Suisse du Travail sera balayée par 78% des voix ! Le Parti socialiste a aidé les bourgeois, car il avait déposé une initiative populaire sur le même thème et appelé le peuple à refuser l’initiative du Parti Suisse du Travail car la leur serait meilleure…pour la retirer tout de suite après la votation et se rallier au contre projet du Conseil fédéral ! L’évolution historique démontrera plus tard que le peuple suisse a eu tort de rejeter l’initiative du Parti Suisse du Travail en 1972, car de nos jours le deuxième pilier est en grande difficulté !
§ 61   Le Parti du Travail lutte pour :
Ø  Que le mandat constitutionnel de l’article 112 déclarant que « les rentes doivent couvrir les besoins vitaux de manière appropriée » devienne réalité.
Ø  Œuvrer au transfert progressif du 2ème pilier dans le 1er, en augmentant les cotisations AVS et en diminuant celles de la LPP. Il est bien entendu que les capitaux acquis par les salariés demeureraient leur propriété.
Ø  Remplacer les prestations complémentaires, sources d’inégalités en raison des effets de seuil, par une AVS ainsi renforcée.
Ø  Amoindrir les dangers liés à la capitalisation boursière du 2ème pilier.

 

LACI et LAMAL
§ 62   Fondement de notre État social, les assurances sociales ont été constituées pour que tout un chacun puisse se prémunir des dommages économiques et sociaux occasionnés par la vie. Toutefois, leur démantèlement systématique, orchestré par la droite libérale, engendre une précarisation de la société et une accélération des disparités. Le chômage, véritable fléau de nos sociétés modernes, ne fait pas exception à la règle. Les révisions successives de la LACI ont ainsi envoyé de nombreuses personnes dans les filets de l’aide sociale, notamment les familles monoparentales, les jeunes et les personnes de plus de 50 ans.
§ 63   La LAMAL, a été imposée par la droite alliée au PS en tant que marché lucratif (« les citoyens doivent apprendre à faire leurs courses sur le marché de la santé » disait alors la conseillère fédérale socialiste Ruth Dreifuss) confié à des caisses privées en concurrence, souvent biaisée par des accords discrets). L’absurdité de ce système devient d’autant plus intolérable que les primes d’assurance maladie de base ne cessent d’augmenter et que le catalogue de prestations tend à diminuer.
§ 64   Cette tendance résulte notamment du caractère particulièrement lucratif du marché de la santé en Suisse. En effet, les caisses-maladie n’ont aucune intérêt ni aucune motivation à offrir des prestations de qualités aux malades, mais uniquement à sélectionner les « bons risques » (les assurés qui payent sans rien coûter) comme réserve de clients pour leurs assurances complémentaires, qui seuls bénéficient de prestations dignes de ce nom. Il est grand temps de mettre fin à l’escroquerie des assurances-maladies. Nous estimons que les assurances ne sont pas un marché, mais un droit : il nous faut plus que jamais des assurances sociales fortes pour une société équilibrée, juste et solidaire. 
§ 65   Au vu de la situation, le Parti du Travail propose, entre autres :
LACI :
Ø  Un droit au travail décent pour toutes et tous ! Cette mesure, déjà envisagée en 1848 lors de l’élaboration de la Constitution fédérale, doit redevenir une priorité de la politique fédérale. Elle permettrait de résoudre définitivement le problème du chômage et en particulier celui de son financement.
Ø  Une hausse des contributions des personnes morales. Ces dernières années, les entreprises ont engendré des bénéfices colossaux. De plus, elles ont pu bénéficier du chômage dit « partiel » pour absorber les périodes de ralentissement économique. Il est dès lors normal qu’elles assument leur rôle social de manière optimale.
Ø  Un prolongement des indemnités d’assurance-chômage. La flexibilisation du marché du travail rend les périodes de chômage, notamment pour les jeunes, toujours plus fréquentes. De plus, il n’est pas acceptable que des personnes de plus de 50 ans finissent leur vie active à l’aide sociale. L’assurance-chômage doit être là pour aider les travailleurs et travailleuses sans emploi.
Ø  La suppression des contradictions juridiques. Certaines personnes sont considérées comme inaptes au travail par l’assurance-chômage et, à l’inverse, aptes par l’assurance-invalidité. Cette situation est inadmissible et pousse dans la précarité de nombreux citoyens
Ø  Le rétablissement des emplois temporaires pour donner le droit à une nouvelle période d’indemnités de l’assurance-chômage ainsi qu’une expérience professionnelle plutôt que de renvoyer les chômeurs vers l’aide sociale et les exclure du marché du travail.
LAMAL:
Ø  La constitution d’une caisse maladie unique et sociale. La multiplication des caisses maladie et les coûts inhérents, ainsi que le système de constitution de réserves ne sont tout bonnement pas acceptables. Une caisse unique, dont les primes seraient basées sur le revenu, doit être réalisée. 


Ø  L’obligation de proposer des génériques. Les génériques sont tout aussi efficaces que les produits de base (protégés durant plusieurs années) et surtout moins chers.
Ø  Une égalité réelle des soins. Le système actuel, basé sur deux types de couverture (base et complémentaire), génère des inégalités sociales particulièrement perverses et qui tendent à se renforcer. Or, l’égalité devant les prestations doit être garantie
 
Situation de l’agriculture suisse et vision pour l’avenir
 
§ 66   La Suisse a réussi à maintenir une agriculture diversifiée de proximité. Toutefois, la situation des agriculteurs se dégrade car aucune mesure n’a été prise pour reconsidérer la valeur de leur travail face au coût de la vie. Leurs produits sont soumis à la pression de la concurrence des pays voisins dont les normes de production sont loin de favoriser un développement durable de notre environnement. Les paiements directs qu’ils reçoivent ne tiennent pas compte de ces contraintes ni du coût plus élevé de la production indigène. Les agriculteurs suisses subissent également de plein fouet la pression internationale sur les prix.
§ 67   Les accords de libre échange notamment par l’application du « Cassis de Dijon » ont d’ores et déjà détérioré le marché agroalimentaire. Par ailleurs les Suisses n’ont plus les mêmes moyens financiers. Leur pouvoir d’achat diminue constamment. Ils doivent désormais souvent favoriser le prix à la qualité. Les produits venant de l’étranger ne répondent pas aux mêmes critères sanitaires et environnementaux. De ce point de vue, on peut considérer qu’il y a concurrence déloyale puisque les critères qualitatifs et du développement durable ne sont pas les mêmes. Par conséquent, nous ne pouvons pas accepter des accords de libre-échange biaisés par des méthodes de production néfastes à l’environnement et socialement inacceptables.
§ 68   Il faut maintenir les paiements directs et les répartir plus équitablement afin que même les agriculteurs isolés au fond des vallées puissent vivre décemment de leur métier et maintenir l’existence du monde rural. N’oublions pas non plus que le travail des agriculteurs inclut l’entretien du paysage pour lequel ils méritent aussi notre soutien.
§ 69   Par son action, le Parti du Travail entend atteindre les objectifs suivants :
-          Mettre fin aux accords de libre échange pour les produits agricoles
-          Soutenir la production indigène afin d’assurer notre autosuffisance alimentaire.
-          Sauver les zones agricoles en interdisant les déclassements.
-          Proscrire toute atteinte physique aux sols (tassement, utilisation comme décharge, enfouissements,…
-          Sauvegarder la biodiversité en maintenant la vie rurale, les rotations de culture et le respect de la nature. 
-          Bannir les OGM (Organismes Génétiquement Modifiés).
-          Imposer à nos stations fédérales de recherches agronomiques des objectifs visant à s’affranchir totalement de l’utilisation des produits phytosanitaires et désherbants chimiques.

Politique énergétique et des transports

§ 70   Depuis longtemps, bien avant la récente catastrophe nucléaire au Japon, le Parti du Travail milite pour un développement planifié des énergies renouvelables: hydraulique, solaire, éolienne, géothermique. A condition d’être dûment supervisé, un tel développement est parfaitement possible et même prometteur dans notre pays. La Suisse possède à la fois l’argent, les technologies et les savoir-faire nécessaires pour être à la pointe dans ce domaine. La récente décision des autorités fédérales de sortir du nucléaire d’ici 2034 ne se réalisera que si elle est accompagnée d’une volonté politique durable de favoriser les énergies renouvelables.
§ 71   Il s’agit pour nous non seulement de soutenir davantage financièrement ce type de projets, mais aussi d’augmenter la part d’investissements publics qui leur est consacrée. Il est également nécessaire d’édicter des règles qui rendent leur réalisation plus facile et plus cohérente grâce à la concertation entre partenaires. Les collectivités publiques doivent être parties prenantes, sous peine de développement anarchique qui ne servira, au final, que les intérêts des grands groupes producteurs.
§ 72   A cela doivent s’ajouter des mesures collectives contraignantes pour économiser l’énergie. Les efforts individuels (tri des déchets, covoiturage, ampoules basse consommation chez soi, etc.) doivent  bien sûr être encouragés, mais ils ne suffiront pas à juguler l’énorme gaspillage énergétique visible partout dans notre société; et dont les petits consommateurs que nous sommes ne sont pas les seuls ni les principaux responsables !
§ 73   C’est à ces conditions que les énergies renouvelables, peu polluantes et guère dangereuses, pourront remplacer efficacement et durablement le nucléaire. La part de ce dernier dans l’approvisionnement énergétique doit progressivement, mais systématiquement, diminuer.
§ 74   Enfin, le Parti du Travail s’oppose aux augmentations des tarifs CFF et veut favoriser par tous les moyens l’utilisation des transports en commun et de la mobilité douce, notamment en ville et entre le domicile et le lieu de travail et limiter progressivement le recours aux  transports par automobile.
§ 75   Parmi les nombreuses mesures à prendre, le Parti du Travail prône :

Ø  Une sortie rapide du nucléaire
Ø  Des investissements de l’Etat dans les projets et programmes de recherches sur les énergies renouvelables

Ø  La gratuité de l’utilisation des transports publics
Ø  La baisse des tarifs des CFF
Ø  Aucune privatisation des biens de première nécessité comme l’eau

Ø  La nationalisation et le contrôle démocratique des grandes entreprises énergétiques

Ø  L’obligation pour les pouvoirs publics de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les énergies renouvelables coûtent moins cher que les autres.
Ø  Des mesures contraignantes prises par l’Etat pour promouvoir l’usage de technologies économes en énergie et l’interdiction des technologies inutilement polluantes
Ø  L’amélioration de l’isolation des bâtiments et l’utilisation de chauffages écologiques.
Ø  des infrastructures performantes et des prestations de qualité pour les transports en commun.
Ø  Le développement de vélos urbains à disposition de tous.
Ø  La mise en place de pistes cyclables et de zones piétonnes.
 

Politique de la formation

§ 76   Le Parti du Travail s'oppose à ce que la formation, les sciences et la culture soient mises au service des intérêts du capital. Il exige au contraire que ces domaines subissent une transformation visant à l'épanouissement individuel et social. L'éducation ne doit pas se limiter à la simple transmission du savoir technique et professionnel ni à la reproduction passive des structures sociales. Il faut assurer à chacun, quel que soit son sexe, son origine sociale ou sa nationalité, la formation de base non seulement pour acquérir un métier, mais pour conduire son existence de façon autonome, pour communiquer, coopérer, défendre ses intérêts. La gratuité de la formation doit être assurée du primaire à l'enseignement supérieur.
§ 77   Toute spécialisation prématurée hiérarchise le système de formation, accroît l'étanchéité de ses divers secteurs et favorise le maintien d'une société élitaire et antidémocratique. Tester les élèves pour les sélectionner avant qu'ils aient pu trouver leur voie et y faire leurs preuves, équivaut à tester le milieu familial. Ces moyens antidémocratiques doivent disparaître en faveur d'une orientation continue pour laquelle élèves, parents, enseignants, psychologues et sociologues doivent collaborer. Le droit de codécision des parents doit être garanti. Les exigences de l'école demandent une formation continue des enseignants pour que les connaissances pédagogiques puissent se traduire dans la pratique.
§ 78   L'éducation préscolaire et parascolaire gratuite doit être développée et ouverte à tous les enfants. La scolarité obligatoire doit accompagner l'élève au moins jusqu'à ses 18 ans. La mixité des classes doit être assurée. Le Parti du Travail demande une formation professionnelle de haut niveau, qui donne une place importante à l'enseignement de la culture générale. L'offre adéquate des places d'apprentissage doit être renforcée. L'État doit créer des ateliers d'apprentissage. Les apprentis doivent bénéficier d'un salaire minimum couvrant le coût de la vie. Le Parti du Travail propose que l'école soit l'endroit privilégié pour une politique interculturelle valorisant chaque culture ainsi que le rôle des femmes dans la construction de la société.
§ 79   Le Parti du Travail soutient :
Ø  Un accroissement des investissements publics dans l’éducation et la formation.
Ø  L’abrogation des accords de Bologne qui conduisent à la privatisation de l’enseignement supérieur
Ø  Une orientation pédagogique moderne, à même d’assurer un meilleur suivi des étudiants comme des apprentis.

Ø  Un salaire minimum augmenté pour les apprentis et des conditions d’apprentissage améliorées, de façon à rendre les filières professionnelles plus attractives et à les revaloriser. L’employeur Confédération pourrait montrer l’exemple.

Ø  Un assouplissement de la règle des quotas minimaux, de manière à ne pas priver certaines régions de centres formateurs essentiels au maintien de leur population et de leurs emplois.
Ø  La création d’un système de bourses d’études performant régi au niveau national, afin de garantir un accès plus démocratique aux formations supérieures.
Le Parti du Travail combat :
Ø  La proposition d’augmenter les taxes d’inscription dans les universités et les hautes écoles, soutenue par la droite.

Ø  L’influence, voire l’ingérence des puissants milieux économiques privés dans les orientations de la recherche, visant à servir leurs seuls intérêts.



Politique internationale
§ 80   La politique internationale prônée par le Parti du Travail se fonde sur les principes de l’internationalisme prolétarien et de la solidarité anti-impérialiste. Nous considérons vital de soutenir dans la mesure du possible les mouvements de libération nationale de par le monde, toutes les résistances à l’impérialisme et les mouvements progressistes ; par devoir internationaliste, puisque la Suisse fait partie des centres impérialistes qui participent à l’oppression des pays du Sud, et parce que les succès des mouvements progressistes plus avancés d’autres pays sont indispensables pour renforcer et faire triompher à terme la lutte pour le socialisme en Suisse même. Le Parti du Travail entretient des relations étroites avec les partis communistes des autres pays, notamment à travers sa participation au Parti de la Gauche Européenne, et aspire à la refondation d’une nouvelle internationale communiste pour unir les luttes des peuples du monde contre le capitalisme et pour le socialisme.
§ 81   Le Parti du Travail est opposé à l’adhésion de la Suisse à l’Union européenne. En effet l’Europe d’aujourd’hui est celle des marchands et non des peuples. Elle est dominée par des bureaucrates nommés qui n’ont pas de comptes à rendre aux peuples et des chefs d’Etats qui imposent leur agenda néolibéral en contournant la volonté démocratiquement exprimée des peuples et les parlements nationaux. Le traité de Lisbonne impose la concurrence libre et non-faussée et la privatisation des services publics, interdit le contrôle des mouvements de capitaux et instaure une gouvernance autoritaire et anti-démocratique. Adhérer à l’Union Européenne reviendrait à signer ce traité, ce qui aurait pour effet de graver le néolibéralisme dans la loi. Actuellement, c’est l’Union européenne qui impose les plans de rigueur aux peuples et c’est contre elle que luttent les travailleurs grecs et portugais. Il est navrant de voir le PS militer pour l’adhésion à l’UE. Cette position absurde ne fait qu’offrir un boulevard à l’UDC.


§ 82   Le Parti du Travail propose comme politique étrangère conforme aux principes de la solidarité internationale :
Ø  La mise en place de garde-fous financiers face à la spéculation des banques et assurances.

Ø  L’interdiction de spéculer sur les matières premières et les denrées alimentaires de base, indispensables à la survie de nombreux humains sur cette terre.
Ø  La création d’un contrôle et d’une taxe sur les mouvements de capitaux.
Ø  L’annulation de tout ou partie de la dette des pays pauvres.
Ø  L’abolition des privilèges décisionnels des États puissants au sein de l’ONU.

Ø  L’intensification de la lutte contre la corruption dans les pays membres de l’ONU.
Ø  Accroître l’aide directe de la Confédération aux pays en développement.

Ø  Favoriser et participer directement aux transferts de technologies.


Le Parti du Travail s’oppose :
Ø  A l’achat de nouveaux avions de combat, inutiles et coûteux.
Ø  A l’adhésion à l’UE néolibérale
Ø  A l’utilisation de l’espace aérien suisse par les avions de l’OTAN qui mènent des opérations de guerre.
Ø  A l’envoi de soldats suisses armés à l’étranger.
 

Politique du logement

§ 83   Depuis des décennies, la crise du logement est un problème majeur à Genève. Le taux de vacance est catastrophiquement insuffisant, et cette pénurie de logements favorise la spéculation immobilière qui fait monter les loyers à des taux exorbitants. Les loyers sont aujourd’hui trop élevés pour la large majorité de la population.


§ 84   Le problème vient de l’avidité des promoteurs et des régisseurs bien sûr, mais aussi et surtout de la politique de l’Etat, qui est exclusivement au service des intérêts des promoteurs immobiliers, au détriment de ceux de la population. Cette politique consiste tout d’abord dans le fait d’attirer sans discernement des multinationales étrangères qui ne créent pas d’emploi à Genève, mais amènent leurs propres cadres auxquels elles subventionnent des appartements, qu’elles sont prêtes à payer plus cher afin des les avoir tout de suite, et contribuent ainsi grandement à la hausse des loyers. Deuxièmement, l’Etat ne construit quasiment plus de logements publics depuis deux décennies.


§ 85   Au lieu de cela, la droite prétend que la pénurie de logements provient des lois qui protègent les locataires, trop restrictives pour les promoteurs et qui les découragent de construire. A la croire, il suffirait de laisser faire les promoteurs dans un marché totalement dérégularisé pour avoir des logements à prix abordables pour tous. Mais c’est là une escroquerie absolue. Loin d’être des freins à la construction, les droits des locataires sont des protections indispensables sans lesquelles les loyers seraient encore plus hauts et la situation pire. Le libre-marché n’avantage que les seuls spéculateurs, qui n’ont pas intérêt de résoudre la crise du logement, tant la pénurie leur rapporte de profits supplémentaires à la vente.  En outre, les promoteurs immobiliers ne veulent construire que des logements de luxe dont il y a déjà largement assez.


§ 86   Pour le Parti du Travail, la spéculation immobilière est le problème et non pas la solution. Afin de construire du logement de qualité accessible aux classes populaires et aux classes moyennes à des prix raisonnables, il faut construire massivement du logement public, cantonal et communal, et du logement coopératif, selon un urbanisme réfléchi, cohérant et écologique ; ce qui impose de tordre le cou à la spéculation foncière. Nous proposons comme mesures :
Ø  L’interdiction des expulsions sans relogement
Ø  Le gel des loyers et leur contrôle par l’Etat
Ø  L’interdiction de la spéculation foncière
Ø  L’application effective du droit de préemption par les communes et par l’Etat
Ø  La nationalisation et le contrôle démocratique de la propriété des la propriété foncière
Ø  Nous nous opposons en revanche à des nouveaux déclassements de terrains agricoles : il y a actuellement suffisamment de terrains constructibles pour loger jusqu’à 800'000 habitants, déclasser des terrains supplémentaires ne sert qu’à doper la spéculation foncière, au détriment de la production agricole locale

 

Politique de la sécurité


§ 87   L’insécurité existe. Seule une certaine social-démocratie ou certains gauchistes peuvent le nier. En tant que parti communiste en lutte contre l’Etat bourgeois, nous ne pouvons pas ne pas être réticents à soutenir toute mesure susceptible de renforcer le bras armé de ce même Etat, qui n’a jamais manqué et ne manquera jamais de l’utiliser contre nous. Mais nier la réalité de l’insécurité que les classes populaires vivent au quotidien et refuser de prendre les mesures nécessaires pour lutter contre cette insécurité ne peut que mener à nous isoler des masses et faire le jeu de l’extrême-droite, qui alors a beau jeu de se faire passer pour le vrai défenseur du peuple. Il n’est toutefois pas question pour nous de faire de la démagogie sécuritaire, sans analyser les vraies causes de l’insécurité, qui sont sociales. Tant qu’existera le capitalisme, la pauvreté et l’exclusion sociale qui en sont les corollaires nécessaires, la criminalité, la violence et le commerce de la drogue existeront inévitablement. La politique de sécurité la plus efficace est donc la lutte contre les inégalités et pour le plein emploi et des prestations sociales dignes de se nom ; exactement le contraire de ce que fait la droite.


§ 88   Nous devons aussi en priorité lutter contre toutes les mesures liberticides et antidémocratiques qui se cachent sous le nom de politique sécuritaire, et qui sont le véritable but visé par la droite, qui n’en a cure de l’insécurité réelle que vit la population, mais en revanche souhaite limiter drastiquement les droits démocratiques afin de garantir son pouvoir. Les mesures liberticides que sont les limitations de plus en plus drastiques du droit de manifester, ou même simplement de militer dans la rue, sont totalement inacceptables. L’hystérie sécuritaire qui consiste à assimiler les militants de gauche et syndicaux à des casseurs et à des dangers pour l’ordre public est extrêmement dangereuse et menace de faire virer la démocratie bourgeoise en dictature fasciste. Elle doit être combattue par tous les moyens. Nous devons affirmer haut et fort que les droits démocratiques, tous les droits démocratiques, sont fondamentaux et inaliénables. Ils ne peuvent faire l’objet d’aucune restriction. Il convient tout autant de s’opposer à l’usage de pièce d’identité biométriques, au fichage des citoyens sur la base de leurs opinions politiques et l’omniprésence des caméras de surveillance, dispositifs dignes d’un Etat totalitaire et dont le but objectif est de favoriser l’établissement d’un Eta policier.


§ 89   Cela dit, il n’en est pas moins important de mener une politique de sécurité publique. La droite prétend qu’elle seule est efficace en matière de sécurité, alors que la gauche serait laxiste. C’est un mensonge éhonté. Depuis des décennies, la droite détient le pouvoir au niveau national et cantonal. Elle porte l’entière responsabilité de la dégradation de la situation en matière de sécurité. C’est la droite qui a fait fermer la plupart des postes de quartier dans les années 2000, entraînant un manque de présence policière et une hausse de l’insécurité dans les communes suburbaines y consécutive. Seul le Parti du Travail s’était opposé à cette décision. C’est la droite qui ne veut pas voter les budgets pour engager des policiers supplémentaires et est donc totalement responsable de leur nombre insuffisant. Le Parti du Travail prône une politique de sécurité publique grâce à une police de proximité. La police doit se recentrer sur ce qui doit être son rôle prioritaire : la lutte contre la criminalité et non la chasse aux mendiants ou la répression des manifestations.


§ 90 Le Parti du Travail prône comme mesures :
Ø  La réouverture des postes de quartier
Ø  Patrouilles policières renforcées à pied ou à vélo, pas en voiture
Ø  Interdiction stricte des entreprises de sécurité privées et des milices d’extrême-droite : l’usage de la coercition doit être un monopole public.
 


Politique de la migration

§ 91   Le Parti du Travail s'oppose avec vigueur à la politique des autorités sur l'immigration et l'asile. Nous demandons l'arrêt de l'ignoble chasse aux étrangers et la fermeture immédiate des centres de rétention. Nous demandons un statut unifié pour tous les étrangers résidant en Suisse et les mêmes droits politiques pour les étrangers aux niveaux communal, cantonal et national après cinq ans de séjour. Nous dénonçons les tentatives faites pour susciter chez les Suisses des sentiments contre les étrangers et luttons contre la xénophobie et le racisme où qu'ils se manifestent. La politique menée par la droite et l'extrême-droite helvétiques vise à diviser les travailleurs en catégorisant arbitrairement ceux-ci: Suisses et étrangers, jeunes et vieux, hommes et femmes.
§ 92   Les étrangers doivent bénéficier d'un droit sans restrictions quant au changement de formation professionnelle, de domicile ou d'emploi. Le principe à travail égal salaire égal doit être appliqué. De même pour la reconnaissance des titres universitaires ou diplômes obtenus hors du territoire, ceux-ci ne doivent souffrir aucune discrimination. En ce qui concerne les assurances sociales, les immigrés doivent être traités de la même manière que les résidents. Il faut veiller à ce que, quelle que soit sa nationalité, l'assuré bénéficie, pour des mêmes cotisations, de prestations identiques. Les étrangers qui ont grandi en Suisse doivent avoir le droit de s'y établir comme celui d'y revenir sans restriction après une absence prolongée. Tout étranger qui réside en Suisse depuis cinq ans sans interruption doit avoir droit à la naturalisation simplifiée.
§ 93   Un des droits fondamentaux est celui de pouvoir vivre avec sa famille. L'autorisation de séjour doit donc, dès le début, inclure les membres de la famille les plus proches, et cela indépendamment de l'état civil du moment. En outre, il faut régulariser la situation des immigrés clandestins. La mise à disposition d'installations publiques et privées doit permettre aux étrangers de maintenir une relation positive à l'égard de leur culture. En même temps il faut offrir aux étrangers toute possibilité d'accès de la culture suisse par l'offre de cours d'introduction à la langue locale et par la possibilité de connaître nos lois, structures et coutumes.

 
Politique des médias

§ 94   Le PST œuvre pour la transformation progressive des moyens de communication de masse en véritables instruments de communication sociale, dans le respect et le renforcement de la liberté d'expression et de la pluralité des opinions. Tous les milieux de la population doivent bénéficier des mêmes droits dans les organes de presse, de radio, de télévision, de nouveaux médias. Dans ce but, il faut en finir avec la dépendance et la soumission des médias aux intérêts économiques et à la concentration des grands groupes de presse. Le PST se bat pour que les infrastructures techniques de l'information soient gérées sous contrôle public. L’égalité de temps de parole ou d’espace pour tous les partis qui se présentent à une élection doit être rendu obligatoire pour les médias télévisuels, les journaux et les radios. Les programmes audio-visuels doivent dépasser le simple divertissement et promouvoir  l'épanouissement culturel, en s'ouvrant largement vers le monde.
§ 95   La liberté de création, d'expression et d'opinion de ceux qui travaillent dans les médias doit être sauvegardée et étendue. Il faut créer dans chaque entreprise de média un organe de défense de la liberté d'expression sous la forme d'un conseil de rédaction. Il est indispensable que la Suisse puisse soutenir les efforts visant à créer un nouvel ordre de l'information. Il faut notamment briser le monopole des agences de presse occidentales et renforcer la position des pays du Sud dans le domaine des médias. Les moyens de communication doivent être employés dans l'intérêt de la paix. Les accords internationaux signés par la Suisse et qui interdisent toute incitation à la guerre et toute propagande raciste doivent être appliqués. Une condition importante pour un processus réellement démocratique serait une information étendue, qui donnerait la parole à tous les milieux de la population, dans tous les médias. Pour créer un espace public démocratique, il convient de fournir aux citoyens du temps libre afin de permettre l'échange et la délibération.

V. Le rôle du Parti et la question des alliances


§ 96   Quelle que soit sa faiblesse aujourd’hui, le Parti du Travail reste et restera l’unique force politique suisse qui défend et représente effectivement les classes populaires, qui reste fidèle aux principes du communisme et qui lutte réellement contre le régime capitaliste, pour le renversement du pouvoir bourgeois, l’établissement d’une démocratie populaire et la construction d’une société socialiste. Le Parti du Travail joue donc dans la politique suisse un rôle nécessaire et irremplaçable.


§ 97   Le Parti du Travail est l’héritier des meilleures traditions démocratiques et progressistes du mouvement ouvrier suisse. Il fonde son action politique sur la pensée de Marx, Engels et Lénine et des penseurs marxistes ultérieurs. Il considère nécessaire de développer créativement le marxiste afin de construire un projet communiste adapté aux réalités de la Suisse du XXIème siècle. Il rassemble dans ses rangs des communistes, des socialistes et des progressistes, tous déterminés à lutter contre l’oppression capitaliste et pour le socialisme, dans un esprit de démocratie interne et de libre expression de tous les points de vue, dans les respect des règles statutaires qui disent que les décisions majoritaires s’imposent à tous. Le Parti du Travail cherche constamment une ligne révolutionnaire juste et adaptée aux conditions objectives du moment, et lutte à la fois contre toutes les déviations gauchistes qui l’enfermeraient dans le sectarisme et le couperaient des masses, et contre toutes les déviations droitières qui paralyseraient sa lutte par l’opportunisme et le réformisme, et pour des avantages illusoires d’un jour le détourneraient de sa raison d’être.


§ 98   Le Parti du Travail estime nécessaire toutes les formes de lutte. Les luttes prioritaires étant celles menées dans la rue, dans les syndicats et les associations progressistes. La lutte parlementaire et gouvernementale est utile et nécessaire à condition de rester au service de la lutte de classe et de la lutte révolutionnaire pour le socialisme. Le Parti du Travail n’oublie jamais que son but est de briser le cadre de la société bourgeoise et ne se laissera en aucun cas enfermer dans la routine des institutions bourgeoises ou dans des coalitions qui le forceraient à mener une autre politique que la sienne. Le Parti du Travail œuvre à la constitution d’un large front populaire sous sa direction, comprenant partis de gauche, syndicats et associations progressistes, afin de rassembler largement toutes les classes populaires, la paysannerie et les classes moyennes pour renverser la domination de la bourgeoisie et construire une société socialiste. A cette fin il collabore avec toutes les forces dont les buts convergent avec les siens, sans jamais perdre de vue l’objectif final et pour autant que cette collaboration ne porte pas préjudice à son indépendance d’action et ne le force pas à mener une politique opportuniste ou gauchiste.
§ 99   Il ne peut conclure des alliances électorales que si celles-ci sont au service de ses objectifs et font progresser sa lutte. En aucun cas il ne conclura de telles alliances sur la base de calculs purement électoralistes, au détriment de la lutte. Le Parti du Travail n’acceptera jamais de s’associer à une dynamique qui implique la dilution de son action et de sa ligne politique dans une organisation de gauche non-communiste. Le Parti du Travail estime nécessaire de travailler en commun avec les partis de la gauche réformiste, car cette collaboration est nécessaire pour la réalisation de son objectif d’un large front populaire pour le socialisme, sans jamais oublier que les objectifs de ces partis divergent des siens et sans jamais s’interdire de les critiquer publiquement lorsqu’ils prennent des positions contraires aux intérêts des classes populaires.



VI. Vers le renouveau socialiste de la société suisse


§ 100 En tant que Parti des toutes les classes que le capitalisme opprime, le Parti du Travail lutte pour la défense des intérêts des exploités et pour leurs revendications immédiates dans les cadre même de la société capitaliste, et tient à participer aux parlements et aux exécutifs bourgeois pour y mener une politique conforme aux intérêts du peuple. Mais son objectif ne s’arrête pas à une gestion plus sociale du capitalisme, ni à de simples réformes à l’intérieur de celui-ci. Car la société capitaliste est irréformable et constitue une impasse pour le développement de la société humaine. Elle doit être radicalement transformée. C’est pourquoi, le Parti du Travail lutte pour le renversement du pouvoir de la bourgeoisie, l’établissement d’une démocratie populaire et la construction d’une société socialiste. L’objectif du Parti du Travail est de mener une révolution socialiste. Celle-ci ne pourra être menée à bien qu’en prenant en compte les conditions concrètes et les traditions démocratiques de la société suisse du XXIème siècle.


§101  La stratégie révolutionnaire du Parti du Travail se fonde sur la construction d’un large front populaire, ressemblant la classes ouvrière, toutes les classes populaires, la paysannerie, une partie des classes moyennes, de toutes les classes qui sont opprimées ou qui se sentent menacées dans leur conditions d’existence par le capitalisme, et de tous ceux qui sont conscients que le capitalisme constitue une impasse pour l’humanité et qu’une transformation de la société est nécessaire. A force de luttes contre le patronat et les politiques réactionnaires de la bourgeoisie, et de luttes internes résolues contres les positions opportunistes et de collaboration de classe, ce front populaire gagnera en unité, en combativité et en puissance, jusqu’à incarner un réel contre pouvoir populaire qui finira par s’emparer du pouvoir d’Etat par l’élection d’un parlement et d’un gouvernement progressiste.


§ 102 Ce nouveau pouvoir populaire sera chargé d’établir un régime de démocratie avancée, qui sera caractérisé par un élargissement important des droits démocratiques et des instruments de participation du peuple aux décision, par la nationalisation du secteur bancaire, par toute une série de mesures à même de limiter le pouvoir des multinationales et d’instaurer une régulation de l’économie par l’Etat dans l’intérêt du pays et du peuple, d’assurer une redistribution des richesses grâce à une taxation conséquente des hauts revenus et du capital, et d’utiliser les importantes rentres financières ainsi obtenues pour développer les services publics, les infrastructures et les prestations sociales, tout en restant encore dans un cadre capitaliste. Mais cette démocratie avancée ne pourra être qu’une étape. Le gouvernement populaire devra faire face à la contradiction entre ses objectifs de bâtir une société plus juste et les lois objectives du capitalisme, ainsi qu’à une résistance acharnée de la bourgeoisie, qui ne renoncera pas à ses privilèges sans combattre et sera prête à recourir à la violence fasciste pour garder le pouvoir.


§103  Le pouvoir populaire ne pourra tenir que grâce à un soutien fort du peuple organisé dans des organisations de masse et de conseils d’entreprise. Il devra livrer une lutte de classe intense contre la bourgeoisie. Cette lutte verra à la fois l’affirmation du pouvoir direct des travailleurs, condition nécessaire pour le dépassement de la démocratie bourgeoise en faveur de la démocratie populaire, l’affirmation du rôle du Parti du Travail en tant que force politique qui défend de façon conséquente les aspirations du peuple.


§104  La défaite finale de la bourgeoisie réactionnaire et des positions opportunistes et réformistes rendra possible l’instauration d’une démocratie populaire et la construction d’une société socialiste grâce à la socialisation des principaux moyens de production, de crédit et d’échange, et à l’établissement d’institutions de planification de l’économie, ce qui rendra possible des choix sociaux de production orientés vers la satisfaction des besoins de tous  et compatibles avec le respect de l’environnement, dans le cadre d’une société garantissant une réelle justice sociale et centrée sur le but de l’épanouissement matériel et culturel de tous ses membres.


§105  La lutte politique du Parti du Travail ne finit toutefois pas là. Car il s’agit de «changer le monde, et changer le monde changé» (Bertolt Brecht), et donc de continuer, dans la société socialiste cette fois, de continuer à lutter pour sa transformation dans le sens du progrès social, avec pour horizon idéal le communisme ainsi décrit par Karl Marx : «Dans une phase supérieure de la société communiste, lorsque la subordination servile des individus dans la division du travail et avec elle l’opposition du travail manuel et du travail intellectuel auront disparu, lorsque le travail ne sera plus un simple moyen d’existence mais sera devenu lui-même premier besoin de la vie, lorsque les forces productives s’accroîtront avec le développement en tous sens des individus et que toutes les sources de la richesse collective jailliront – alors seulement l’étroit horizon juridique bourgeois pourra être complètement dépassé et la société inscrira sur ses drapeaux : de chacun selon ses capacités, à chacun  selon ses besoins.»